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"La légion d’honneur reste la décoration de référence qui fait envie à une grande majorité de Français"

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02.08.2023

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"La Légion d’honneur reste la décoration de référence 
qui fait envie à une grande majorité de Français"


Alain Coldefy, président de la Société des membres de la Légion d'honneur (SMLH) depuis 2018 et ancien major général des armées, revient pour Sciences Po Alumni sur l’histoire et l’avenir de la plus haute distinction nationale.

La Société des membres de la Légion d’honneur regroupe les anciens décorés et mène des actions sociales auprès des jeunes apprentis et des personnes isolées. Elle compte 45 000 membres.

Propos recueillis par Bernard El Ghoul et Elisabetta Lamanuzzi 

L’inflation du nombre de Légions d’honneur accordées chaque année interroge. En France, les récompenses ont-elles encore un sens en 2023, à l'heure de l'immédiateté et des réseaux sociaux ?

Les Français ont tendance à penser que la Légion d’honneur est une décoration qui est donnée n’importe comment. Ce n’est pas le cas : entre 10 et 12 % des dossiers filtrés par les préfets sont retoqués. Par ailleurs, le grand public ne sait pas ce que les personnes décorées ont fait réellement pour mériter cette distinction. Il faut souvent une vingtaine d’années de service pour recevoir la Légion. Mais, dans certains cas, cela peut être plus rapide. Par exemple, on ne va pas attendre que Kylian Mbappé ait 45 ans pour le décorer. Et dans l’esprit de certains, c’est une récompense qui s’adresse avant tout aux militaires, ce qui n’est pas vrai. Lorsqu’il avait été décoré en 2018, Olivier Giroud avait déclaré : « je pense surtout aux combattants de la guerre qui méritent bien plus que nous ».

Vous parliez d’inflation, et en effet il y a une dizaine d’années, on dénombrait environ 90 000 décorés par an. Mais ce chiffre est en baisse : en 2023, il y a eu 79 000 décorés. Cette diminution est notamment due au fait que les décorés militaires sont moins nombreux qu’avant. Toutefois, il s’agit d’une décoration qui est en grande majorité civile. À l’origine, Napoléon Bonaparte avait créé (en 1802 NDLR) cet ordre après la Révolution pour rassembler les Français dans un ordre sans distinctions de sexe et d’origine, qui récompensait à la fois la bravoure militaire et le mérite civil. Le premier décoré par Napoléon était d’ailleurs un civil. Dans l’histoire de France, il y a eu un grand nombre de militaires décorés entre la Première Guerre mondiale, la Seconde Guerre mondiale, l’Indochine et l’Algérie.

Il y a également eu une politique de réduction du nombre de décorés. Depuis deux ans, le président de la République Emmanuel Macron a baissé de 50 % les contingents civils et de 15 % les contingents militaires. Arithmétiquement, le nombre de militaires va croître par rapport au nombre de civils.

Emmanuel Macron a introduit dans les faits la parité entre les hommes et les femmes chez les civils. Dans les entreprises, les femmes étaient, pour des raisons anormales, orientées vers l’Ordre du mérite et les hommes vers la Légion d’honneur. C’était quelque chose d’historique. Depuis 2020, la parité va donc aussi faire décroître le nombre de décorés.


Ces récompenses ont-elles encore un sens et comment sont-elles perçues par les Français ?

Les sondages nous montrent que la Légion d’honneur reste la décoration de référence qui fait envie à une grande majorité de Français. Deux autres sont assez prisées : le Mérite académique et le Mérite agricole. Ce qui est frappant, c’est que chez mes sociétaires – répartis sur près de 600 comités en France – l’intérêt pour ces décorations est apolitique. En outre, la majeure partie de mes sociétaires rendent la Légion à leurs concitoyens, dans leur tissu local.


Comment définir l'honneur ? Les critères d'attribution sont-ils toujours les mêmes depuis 1802, alors même que certains dénoncent des critères subjectifs, opaques et politiques ?

Les effectifs de la Société des membres de la Légion d'honneur diminuent ; on arrive peu à recruter parmi les nouveaux décorés. Il faut donc les motiver et faire connaître la Légion d’honneur. À la fin de la Première Guerre mondiale, la France a créé l’association des gueules cassées (L'Union des Blessés de la Face et de la Tête, 1921, NDLR), approvisionnée par les gains de la loterie nationale. C’était la reconstruction. Dans le même temps, la France a su motiver les Français. De Gaulle a ensuite lancé la France dans l'aéronautique, le nucléaire et l’espace. On manque aujourd'hui d’un élan stratégique qui motive les Français autour de quelque chose. 

On a gardé le socle – l’honneur, la solidarité, la promotion des valeurs de la République – avec un projet associatif tourné vers la jeunesse, afin de créer un lien entre les générations et de dynamiser la Légion d’honneur. On a défini de grandes options, comme récompenser par des prix des apprentis. Dans chaque département, il y a un prix du meilleur apprenti. Ces jeunes reprennent confiance en eux.

On fait aussi de l’aide à la naturalisation. On remonte ainsi aux valeurs de la République ; on ferme la boucle. On délivre des brevets de citoyens à des élèves de CM2, on aide les professeurs des écoles qui sont très peu armés en matière d’instruction civique. Notre approche se fait donc par la jeunesse (la société des membres de la Légion d’honneur a accompagné plus de 9000 jeunes en 2020, NDLR). Il y a un an, j’ai reçu 800 jeunes dans la cour des Invalides.


Est-ce que beaucoup de personnes refusent la Légion d’honneur ?

Certaines personnes la refusent avant que le dossier ne soit fait. En revanche, une fois que vous êtes décoré, seul le Président de la République peut vous retirer la Légion. Ceux qui la refusent au moment de l’annonce des nominations veulent en fait faire leur promotion par une annonce qu’ils jugent fracassante !


Peut-on être radié de l'ordre de la Légion d'honneur ?

Oui, si vous êtes condamné au pénal. Quand vous êtes condamné, il y a un décret publié au Journal Officiel. Il y en a une vingtaine par an. Par le passé, des personnalités comme Philippe Pétain ou Maurice Papon ont été radiées à la suite de leurs condamnations, mais également John Galliano ou Lance Armstrong sur décret présidentiel.


La Légion d’honneur est-elle un outil de diplomatie et d’influence ?

Incontestablement ! Cela fait partie des usages diplomatiques internationaux, à l’occasion de visites d’État par exemple. Il y a une donc une partie purement politique ; mais de grands industriels, des chercheurs ou encore des écrivains étrangers sont également décorés, en France ou à l’étranger. C’est en effet un outil d’influence et de rayonnement de notre pays.




Liste des Sciences Po nommés dans la Légion d’honneur en janvier 2023


                                                                                     

Morali (Véronique, Hélène, Alice) Commandeur

Présidente du directoire d’une société spécialisée dans les médias en ligne. Officier du 7 février 2014

Guillaume (Marc, Pierre, Félicien) Commandeur

Préfet de la région d’Ile-de-France, préfet de Paris. Officier du 13 mai 2017



Lémery, née Tamisier (Sandrine, Hélène, Théodora) Officier

Vice-présidente d’un institut de formation professionnelle. Chevalier du 13 mars 2014

Borione (Delphine, Marie, Michèle) Officier

Ambassadrice pour les droits de l’homme, chargée de la dimension internationale de la Shoah, des spoliations et du devoir de mémoire. Chevalier du 7 mars 2012

Labourdette (Marie-Christine, Annick) Officier

Administratrice civile, présidente de l’établissement public du Château de Fontainebleau, membre du conseil d’administration et cofondatrice d’un festival de musique baroque. Chevalier du 2 mai 2012

Mazauric (Vincent, Jean, Marie) Officier

Ancien directeur général de la Caisse nationale des allocations familiales, conseiller d’Etat. Chevalier du 8 septembre 2010



Bergogne (Sophie, Françoise) Chevalier

Conseillère référendaire à la Cour des comptes, présidente d’une chambre régionale des comptes ; 37 ans de services.

Chenut (Éric, Sébastien) Chevalier

Président d’un syndicat professionnel de mutuelles, président d’une association dédiée à la prévention et à la promotion de la santé ; 27 ans de services.

Patino (Bruno, Adrian) Chevalier

Président d’une chaîne et d’un groupe de télévision ; 34 ans de services

Veyrat-Masson (Isabelle) Chevalier

Directrice de recherche émérite au Centre national de la recherche scientifique, enseignante-chercheuse, historienne et sociologue des médias ; 44 ans de services

Balas, née Beaupère (Laurence, Marie, Blandine) Chevalier

Administratrice d’une fondation pour le développement de l’entrepreneuriat ; 35 ans de services

Larhant, née Maury (Laurence, Françoise) Chevalier

Administratrice des douanes et droits indirects dans un service de lutte contre les stupéfiants ; 35 ans de services

Poulain (Pierre, Robert) Chevalier

Contrôleur général de la Banque de France ; 39 ans de services

Lasserre (Virginie, Liane, Marie) Chevalier

Préfète de la zone de défense et de sécurité Nord, préfète du Nord ; 30 ans de services

Margenet-Baudry (Bénédicte) Chevalier

Contrôleuse générale des services actifs de la police nationale ; 21 ans de services

Marty (Laurent, Fabrice, Denis) Chevalier

Colonel hors classe de sapeurs-pompiers professionnels, directeur départemental d’un service d’incendie et de secours ; 31 ans de services

Vergez-Chaignon, née Vergez (Bénédicte, Laurence, Françoise) Chevalier

Historienne spécialiste de la Seconde Guerre mondiale ; 34 ans de services

Lortholary (Bertrand, Marie, Etienne) Chevalier

Directeur d’Asie et d’Océanie au ministère ; 29 ans de services

Laurent-Atthalin, née Corns (Nathalie, Geneviève, Marie-Pierre) Chevalier

Cheffe de cabinet du Conseil d’Etat ; 32 ans de services

Leÿs (Martin, Jean, Michel) Chevalier

Délégué régional d’un groupe de production et de fourniture d’énergie, président d’un collectif en faveur de l’insertion socioprofessionnelle et de l’emploi ; 39 ans de services

Roger (Patrick, Michel) Chevalier

Gérant de société, président d’un organisme œuvrant à la réinsertion professionnelle des jeunes ; 40 ans de services

Vigier (Michel, Alain) Chevalier

Délégué général départemental d’une organisation patronale, vice-président d’une caisse régionale d’assurance retraite et santé au travail ; 36 ans de services

Matard-Bonucci, née Matard (Marie-Anne, Claire, Joséphine) Chevalier

Professeure des universités en histoire contemporaine, présidente d’une association de lutte contre l’antisémitisme et le racisme ; 42 ans de services. Mme Zozor (Yasmina), proviseure ; 34 ans de services

Monteils (Jean-François, Max) Chevalier

Président du directoire d’un établissement public à caractère industriel et commercial

Wargon, née Stoléru (Emmanuelle, Jeanne) Chevalier

Ancien secrétaire général du ministère ; 29 ans de services

Michel (Laurent, Igor) Chevalier

Directeur général de l’énergie et du climat ; 32 ans de services

Zeller (Florian, Jacques-Yves, Dimitri) Chevalier

Écrivain, dramaturge, scénariste, réalisateur, cofondateur d’une société de production ; 21 ans de services

Vidalenc (Muriel, Luce, Isabelle) Chevalier

Directrice générale adjointe d’une agence régionale de santé ; 36 ans de services

Magnant, née Clion (Virginie, Brigitte) Chevalier

Directrice générale d’une caisse nationale de solidarité pour l’autonomie ; 24 ans de services

Mouchenik (Dafna, Evelyne, Nelly) Chevalier

Directrice générale d’une société d’aide et de maintien à domicile ; 22 ans de services

Reverte, née Delaveau (Karine, Anne) Chevalier

Directrice générale d’une association pour l’insertion sociale et professionnelle des personnes en situation de handicap ; 28 ans de services

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