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Compte-rendu de la dégustation du 16 décembre 2015 - Eric Morgat

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Sciences Po Millésimes

Entités

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12.16.2015

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Eric Morgat 

David Toutain
29 rue Surcouf -75007 Paris
Mercredi 16 décembre 2015 à 20h00

  

A Sciences-Po Millésimes, nous avons une règle : découvrir à chaque événement le travail de quelqu’un qui compte parmi les meilleurs. Et une exception : découvrir le travail de deux personnes au sommet de leur art.

 

Mission réussie, à l’occasion de ce qui est à ce jour l’une des plus mémorables sessions mets/vins du club. Imaginez donc !

 

D’un côté Eric Morgat, l’emblématique vigneron de Savennières, qui depuis 20 ans a constitué à la dure un domaine de 6 hectares, entre rachats, reventes et défrichages. Une quête de l’excellence qui passe par le cassage de cailloux à la barre à mine, et des premières années où l’on perd à chaque fois la moitié des plants…

 

De l’autre, et dans la salle particulière située à la porte juste à côté de son restaurant, David Toutain, l’un des chefs parisiens les plus en vue, déjà auréolé d’une étoile, en attendant sûrement mieux, avec une cuisine de petites touches, entre classiques revisités avec respect et intuitions en passe de devenir des signatures. Le tout avec sourire et humour.

 

S’il y a une chose à retenir des vins d’Eric Morgat, c’est leur étonnante complexité. Ce que l’on perçoit au nez est déjà riche, mais c’est déjà un autre vin que l’on prend en bouche. Quand à celui que vous dégustez après vingt minutes de retour à température, il a encore changé.

 

Autre grande caractéristique : même si nous sommes sur les bords de Loire, une région dont la palette est très étendue, Eric Morgat ne fait que des blancs, des blancs secs et, pour être plus précis encore, des blancs austères, qui misent sur l’élégance.

 

Démonstration en cinq temps.

 

Un Savennières « Fides » de 2013 pour commencer. Issue d’une parcelle plantée sur des schistes, avec des plants soumis à un stress hydrique, la bouteille restitue ce combat, entre acidité et amertume, des touches de fruits blancs, puis une évolution florale.

 

David Toutain propose alors deux amuse-bouche qui jouent sur ces entre-deux tendus, cette confrontation en finesse. Bâtonnets de salsifi et de panais pour commencer, d’autant plus originaux qu’il faut les tremper dans une petite crème au chocolat blanc. Une huître ensuite, travaillée dans la coquille avec kiwi et yuzu.

 

Nous passons ensuite sur un Anjou de 2011. Il s’agit là d’une parcelle située à à peine 8 kilomètres de Savennières, sur les bords du Layon. Mais quelle différence ! Il faut dire qu’Eric Morgat y travaille sur une faille géologique, dans un environnement de roches volcaniques ou pousse naturellement une végétation méditerranéenne. Plus aguicheur, il offre d’abord des senteurs de fruits jaunes, et autre chose que l’on cherche encore à définir. N’y avait-il pas une pointe de framboise ? Ou de chocolat blanc ? En bouche, une attaque gourmande vite contrebalancée par un retour amer, avec des agrumes voire un peu de café.

 

Deux réalisations terriennes pour accompagner ce vin tellurique (« Litus », latinisation du grec pour « roche »). Une petite terrine de ris de veau ouvre la danse avec des touches de coing confit. La carotte, elle aussi confite, suit avec oignon et gingembre. On sent que David Toutain prend plaisir au voyage dans cette bouteille qui joue sur les saveurs qu’il affectionne, et accompagne si bien le légume.

 

Retour à Savennières pour le troisième temps, et nouveau changement de décor. Pourtant, il s’agit seulement de passer sur le millésime 2012 de la cuvée Fides. Mais cette fois-ci les saveurs associent le végétal et le citronné, avec des pointes salines et iodées assez marquées.

 

Avec beaucoup d’à-propos, le dîner aborde une phase marine. Nouveau pas de deux, qui voit succéder à la Saint-Jacques en coquille un cabillaud confit avec épinard et beurre noisette.

 

Il est alors l’heure de découvrir « L’Enclos » (l’ancien nom de la cuvée de Savennières du domaine, avant une recomposition partielle de son parcellaire), sur un millésime 2010. Et encore un autre vin, caractérisé par l’amertume et les agrumes, avec des touches minérales et de légumes racinaires.

 

Dans l’assiette, quoi d’autre qu’un velouté de topinambour, au jaune d’œuf ? Une anguille fumée à la crème de sésame noir évoque un lien possible avec la gastronomie japonaise.

 

Cinquième temps : l’Enclos toujours, mais en 2009. Et à nouveau une surprise : le nez est sur la pomme, un peu beurré. Mais il y a aussi un peu de fruit confit, de cire, peut-être de sherry, et des arômes poivrés en fond de bouche.

 

Prenant résolument le parti de la première impression, une volaille normande pomme au four est sur la table.

 

En guise d’au revoir, David Toutain nous offre une crème chou fleur, coco et chocolat blanc. Puis sa crème au lait cru et miel de niaouli.

 

Rarement le verre et l’assiette auront été autant en accord, et rarement le potentiel d’expression du chenin aura été aussi clairement démontré.

 

 

Les vins

Savennières « Fides » 2013

Anjou « Litus » 2011

Savennières « Fides » 2012

Savennières « L’Enclos » 2010

Savennières « L’Enclos » 2009

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