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Compte-rendu de la dégustation du 5 décembre 2018 - Vins Nature : Metras, Labet, Fhal et les autres

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12.05.2018

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« Vins Nature : Metras, Labet, Fhal et les autres » chez David Toutain

Salon Identi-T (Restaurant David Toutain)
29 rue Surcouf - 75007 Paris
Mercredi 5 décembre 2018 à 20h00
 

 

Grande soirée de Sciences Po Millésimes.

 

Les camarades qui nous font l’amitié de participer à nos dîners de fin d’année chez David Toutain savent à quel point ceux-ci sont riches en souvenirs et moments forts. Comment oublier, par exemple, la visite que nous y ont rendue Eric Morgat et Jean-Yves Bizot ?

 

Il y avait pourtant, en cette fin d’année 2018, quelque chose en plus. Etait-ce le thème de la soirée – les vins nature des meilleures provenances, ceux que nous proposent des vignerons qui savent maîtriser le travail sans intrants – dont nous nous doutions qu’il rencontrerait un écho particulier dans cette maison qui trouve le meilleur de son inspiration dans l’observation de notre environnement, et le traduit avec une très grande maîtrise d’exécution ?

 

Pour première preuve, ce « bois de salsifis », mise en bouche signature de David Toutain, où le légume se confond avec les branchages qui le supportent et qui, une fois découvert, se déguste en le plongeant dans une crème de panais et chocolat blanc. Il précède une bouchée de foie gras au tamarin, puis une huître à l’échalote.

 

C’est du côté du Jura que nous allons chercher notre première bouteille, au Domaine Labet. Les Varrons, en 2015, est un chardonnay. Il accompagne, grâce à sa complexité, les saveurs variées de cette première salve. Un léger fond d’agrume (pamplemousse), un côté oxydatif, puis salin, minéral avec de la pierre à fusil en finale, le tout sans omettre des pointes de fleurs blanches. Un très beau vin, d’un domaine phare.

 

Nous continuons avec des choux de Bruxelles, sur une crème légère au pin de Douglas. Le pin de Douglas, encore, à infuser dans une huile d’olive devenue lumineusement verte, dans laquelle on trempe une foccacia. Les sensations mêlent l’amertume, l’onctuosité et le végétal.

 

Un Clos du Rouge-Gorge, de Cyril Fahl, en 2017, répond à l’invitation. Le macabeu majoritaire, jeune encore et servi frais, a gardé le côté sauvage, pierreux et herbacé, froid, des garrigues venteuses qui l’ont vu naître. Un léger perlant s’estompant, une touche d’oxydatif lui apportent un surcroît de vivacité, qui anime le plat. Le travail de ce vigneron, et cette bouteille en particulier, ont été salués à juste titre dans un article paru dans le n° 5 de la revue 12°5.

 

Un risotto de céleri aux champignons suit, accompagné d’un beurre en chapelure de légumes (cèpe, châtaigne et panais). Une touche gourmande, ronde et onctueuse.

 

La bouteille est en contraste. Le Domaine Lucas & André Reiffel produit un Gewurztraminer de macération, avec rafles, dont la production ne dépasse pas les 20 hl par hectare et au final 2.200 bouteilles. Si l’on retrouve, au nez, sur ce 2017, un litchi familier, avec un peu d’orange, la bouche est portée sur l’amertume, avec une belle persistance en fond de bouche. Une bouteille rare et pointue, pour amateurs avertis, que le plat met en valeur : le gras tapisse le palais pour diffuser les sensations, sans imposer de saveur discordante.

 

Le cabillaud, à l’épinard et feuille de citronnier, propose maintenant une assiette alliant l’iode, le végétal et une pointe d’acidité.

 

C’est le Clos du Rouge Gorge que nous retrouvons, cette fois chambré. L’expérience est des plus intéressantes. Le nez a évolué en ajoutant des sensations de fumé, et a dans l’ensemble gagné en longueur. La bouche a de l’amertume mais une palette d’agrumes s’adoucissant : pamplemousse, citron confit, kumquat. Le fumé avec le poisson, le citronnier avec les agrumes. Ce nouvel accord est cohérent. Il faut saluer la capacité de la bouteille à répondre, par sa richesse, aux différentes propositions qui lui sont faites.

 

Nous attaquons à présent les rouges, sur une anguille avec une crème au sésame noir. Un poisson certes, mais goûteux, typé, sur un support onctueux et marqué. Passé la surprise, on goûte avec bonheur l’accord sur une bouteille d’Yvon Métras, grand nom des vins nature et du Beaujolais, en l’occurrence sur un 2017, issu d’une parcelle située en hauteur par rapport à l’appellation village de Fleurie. Le vin y gagne encore en fraîcheur et en spontanéité. L’ensemble est au plus près du fruit (une framboise, une fraise mûre) et vivifié par un léger perlant, un peu d’acidité. Un must pour les amateurs de vins gourmands en légèreté, pouvant être bus jeunes.

 

La poule, au persil et girolles, offre l’occasion d’une intéressante dégustation à l’aveugle avec deux vins, plus un invité surprise, grâce à la complicité de notre camarade Antoine.

 

Les deux vins sont de la même année, sur le même terroir. Mais l’un provient d’une maison travaillant (très bien) de manière conventionnelle ; l’autre d’un domaine de vins nature (mais avec beaucoup de maîtrise, sans déviance). Où sommes-nous et quelle est laquelle ? A la vue, au nez, à la couleur, à la bouche généreuse, on s’accorde assez rapidement sur des vins du Rhône, sur un millésime récent. L’un de nos camarades identifie finalement des Saint-Joseph ; c’est bien cela, en 2016. Quel est alors la bouteille préférée, et est-elle nature ou conventionnelle ? Deux camps se forment et s’affrontent, jusqu’à ce que l’on découvre, à égalité, les noms des Domaines André Perret (en conventionnel) et François Dumas (en nature).

 

L’invité surprise est manifestement un bordelais ; lui aussi plein, gourmand, mûr. C’est, en Pauillac, un Pontet-Canet. Le château travaille depuis des années en biodynamie, et ce vin de plaisir pouvant affronter les années est un 2015. On l’on voit que la rive gauche s’éloigne peu à peu du boisé et de l’astringence qui caractérisait souvent sa jeunesse.

 

En point d’orgue, sur des bouchées de dessert (caramel et sarrasin, algues, citron ; bergamote et cardamone ; crème choux-fleur, chocolat blanc et coco), un Vin de France signé Thomas Batardière. Ce vigneron du Maine-et-Loire, de plus en plus en vue, produit un chenin botrytisé « Oscar », qui prouve l’intérêt qu’il faut porter aux beaux moelleux de Loire. De la fraîcheur, de l’ampleur, un nez sur le fruit blanc puis le coing, une bouche exotique. Tout y est pour conclure cette soirée mémorable.

 

Oui vraiment, cette soirée aura laissé un souvenir particulier. Un grand merci à notre camarade Pierre-Benoît pour la sélection des bouteilles (et à Antoine pour le Pontet-Canet). Un grand bravo à David Toutain qui, un peu plus d’un mois plus tard, décrochait sa deuxième étoile.

 

 

Les vins dégustés

 

Côtes du Jura, Les Varrons, Domaine Labet, 2015 (blanc)

IGP Côtes catalanes, Clos du Rouge-Gorge, 2017 (blanc)

Alsace Gewurztraminer, Lâcher Prise, Domaine Lucas & André Rieffel, 2017 (blanc)

Beaujolais, Yvon Métras, 2017 (rouge)

Saint-Joseph, Domaine André Perret, 2016 (rouge)

Saint-Joseph, Domaine François Dumas, 2016 (rouge)

Pauillac, Château Pontet-Canet, 2015 (rouge)

VDF, Oscar, Domaine Thomas Batardière, 2017 (blanc moelleux)



David Epaud
Président du Club Sciences Po Millésimes

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