Compte-rendu du petit-déjeuner avec Nicolas Revel Directeur général de la CNAM
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La réception du directeur général de la puissante caisse nationale d‘assurance maladie, Nicolas Revel, un de nos condisciples, est un évènement que le Groupe santé de Sciences Po n’a pas boudé. Cette belle rencontre a permis d’évoquer la situation des comptes sociaux et d’envisager les perspectives d’organisation nouvelle. Extraits.
Les « conditions sont bonnes », pense Nicolas Revel. Nous avons « grignoté le déficit et l’avons ramené autour de 4 Milliards en 2017. Il devra disparaitre en 2018 ». Ce qui place la France dans une situation économique favorable. Mais pourtant, déplore-t-il, le système dans son ensemble est sous tension. Les français vivent mal leurs difficultés d’accès aux soins et les inégalités qu’ils ressentent. Les tensions sont réelles et le responsable ne les nie pas. Car plusieurs carences ne sont pas normales au regard des sommes investies. Et « le système décroche » dans plusieurs domaines. Si la qualité globale est satisfaisante et si les « restes à charge » sont parmi les plus faibles des pays de l’OCDE, « nous avons des trous dans la raquette ».
Un diagnostic partagé
Nicolas Revel rappelle que les tendances « naturelles » d’augmentation des coûts sont de 8 M€. Et nous devons absorber, sans y être préparés, des chocs budgétaires créés par les nouveaux traitements très coûteux. Les tendances inflationnistes sont donc fortes. « Nous veillons à ne pas nous laisser dépasser par des fuites de dépenses ». La question est : comment réussir à assurer la soutenabilité de système social et « rester sur la crête de 2 % d’augmentation des dépenses ? ». L’efficacité de la médecine libérale est réelle mais la « course aux volumes » épuise les médecins et les comptes publics. Or, d’un côté, nous n’avons le choix que de modérer la progression des comptes et d’un autre, les pathologies chroniques ont doublé en vingt ans. La manière de faire actuelle est d’agir sur les tarifs. Mais en réalité, il faudrait réorganiser le système et engager les professionnels à « réduire les rigidités ». La médecine libérale est mal organisée avec un nombre de généralistes qui va encore diminuer pendant 7 à 10 ans. L’hôpital français, de son côté, dépense beaucoup et la France est le 2ième pays du monde quant à ses dépenses hospitalières. Et ce, malgré les efforts consentis ces dernières années au travers du développement réussi de la chirurgie ambulatoire. « Il faut maintenant améliorer l’hospitalisation à domicile ». Enfin, si les modes de rémunération à l’acte et à l’activité sont des systèmes productifs, ils sont trop dominants dans le cadre de prises en charge globales de malades sur de longues périodes.
Des chantiers prioritaires
La régulation ne se partage pas. L’Etat assume ses responsabilités. Elles ne peuvent être transférées à des entreprises et aux mutuelles. Mais il convient, dans un proche avenir, d’engager tous les acteurs dans des mouvements de réformes. Il faut « pousser » les GHT (groupements hospitaliers de territoire) afin de les rendre cohérents et libérer du temps médical. Surtout, il convient de donner une priorité à la notion de pertinence des soins qui doit « tous nous engager ». La ministre porte cette initiative parce qu’elle est médecin. Les sociétés savantes doivent s’engager dans cette démarche de « faire différemment pour un soin plus juste ». Et le devoir des industriels du médicament qui imposent des prix déraisonnables et dont les rentabilités sont souvent excessives n’est pas moindre. L’article 35 du PLFSS 2018 permettra d’imaginer de nouvelles formes de paiements. Concernant le DMP (dossier médical partagé), sur lequel la CNAM va communiquer, le directeur promet de réussir à l’imposer. « Les signes sont encourageants ». Il faut que les patients l’utilisent et il sera développé au niveau national dès 2018 en trois ou quatre ans. Rendez-vous pris.
Pascal Maurel
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