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L'Opéra au salon : hommage du Met aux lauréats des National Council Auditions (programme du 11 au 17 mai 2021)

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05.09.2021

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Cette semaine met en valeur les lauréats des National Council Auditions. 

Ce concours, créé en 1954, attire tous les ans plus de 1000 jeunes chanteurs du continent nord-américain de moins de trente ans à qui est offert le rêve de chanter sur la scène du Met (finale) et de lancer une carrière nationale et internationale. 

Parmi ceux-ci, on compte la fine fleur de l’art lyrique des dernières décennies : Renée Fleming, Susan Graham, Thomas Hampson, Ben Heppner, Jessye Norman, Teresa Stratas, Frederica von Stade, Eric Owens, Stephanie Blythe, Lawrence Brownlee, Michael Fabiano, Lisette Oropesa, Christian Van Horn, Jamie Barton, Anthony Roth Costanzo, Nadine Sierra, …  

On pourra en voir et écouter quelques-uns (en gras dans le programme) et visionner un documentaire qui nous entraînera dans les coulisses du plus grand concours d’art lyrique américain.

 

Mardi 11 mai
Puccini La Bohème
Avec Teresa Stratas (Mimi), Renata Scotto (Musetta), José Carreras (Rodolfo), Richard Stilwell (Marcello) et James Morris (Colline). Création en février 1896. Sous la direction de James Levine. Production de Franco Zeffirelli. Représentation du 16 janvier 1982.

Une des œuvres les plus représentées du répertoire, la Bohème continue à enthousiasmer des générations d'amateurs par son scénario parfait, une gradation intelligente dans l'intrigue, son intuition psychologique et une partition poignante qui accompagne à merveille les différents tableaux de ces scènes de bohème où chacun peut s'identifier et vivre ou revivre son expérience, grande ou petite. Sans oublier de célébrissimes airs: Che gelida manina ! A chaque nouvelle audition /vision de cette histoire d'amours et d'amitiés, on trouve de nouvelles richesses. 

Avec trois autres jeunes bohèmes (peintre, philosophe et musicien), le poète Rodolfo vit dans un atelier-mansarde sous les toits de Paris. Un jour Mimi, sa voisine qui vit seule, frappe à sa porte, sa chandelle est morte et elle n'est pas très bien. Ils ont le coup de foudre et commencent leur histoire tandis que le peintre Marcello retrouve Musetta et les deux couples se constituent. La santé de Mimi se détériore et l'amitié vient au secours …

La production de Zeffirelli, ici dans sa version originale de 1981, est devenue un classique visible sur les grandes scènes internationales. Elle donne à voir le Paris de 1830, avec des décors spectaculaires, une reconstitution de fête (plus de 250 figurants) et du célèbre café Momus, lieu de rendez-vous du monde littéraire et de la bohème et réputé pour ses prix raisonnables.  

Ici c’est le grand Met avec trois des gloires du chant du XXè siècle dont une Stratas à l’extraordinaire charisme au faîte de sa gloire dans un de ces deux rôles signature et une Scotto étonnante en Musetta. 

Une version de référence de ce classique des classiques  

 

Mercredi 12 mai
Mozart Don Giovanni
Avec Carol Vaness (Donna Anna), Karita Mattila (Donna Elvira), Dawn Upshaw (Zerlina), Jerry Hadley (Don Ottavio), Samuel Ramey (Don Giovanni), Ferrucio Furlanetto (Leporello) et Kurt Moll (Commendatore). Création en octobre 1787. Sous la direction de James Levine. Production de Franco Zeffirelli. Représentation du 5 avril 1990.

« Opéra des opéras » (Wagner), Don Giovanni a toujours été une des œuvres les plus appréciées du répertoire. Fascination pour la figure quasi-légendaire de Don Juan, libertin et blasphémateur ? Admiration pour le mélange ambigüe de comique et de tragique et la synthèse inégalée des deux genres ? Emerveillement devant la qualité de sa musique, de ses magnifiques ensembles et airs célébrissimes ?  Don Giovanni a été et est encore l’objet d’analyses et d’interprétations en tous genres sur sa nature et sur la vérité humaine qui le sous-tend, chaque metteur en scène cherchant à lever un aspect du personnage.

A Séville au XVIIè siècle, Don Giovanni, aidé par son serviteur Leporello, cherche à abuser Donna Anna. Interrompu par le père de celle-ci, le Commandeur, il le tue et s’enfuit. Donna Anna et son fiancé jurent de le venger. Don Giovanni, fidèle à lui-même, rencontre un mariage et entreprend la fiancée Zerlina qui est sauvée in extremis par Donna Elvira qu’il avait séduite et abandonnée auparavant … Tous le poursuivent et se retrouvent dans une soirée qu’il organise et où il est démasqué …

La superbe production de Zeffirelli place l’action dans un XVIIIè siècle baroque minutieusement reconstitué. Privilégiant la beauté visuelle (décors, costumes, éclairage) aux analyses psychologiques ou intellectuelles, elle fournit un très bel écrin à une pléiade d’excellents chanteurs, dont trois des plus grandes basses des trente dernières années : Samuel Ramey (cf photo), Ferrucio Furlanetto et Kurt Moll ! 

Un grand classique dans une très belle version qui met en avant le chant et la beauté visuelle

 

Jeudi 13 mai
Wagner Tristan und Isolde
Avec Jane Eaglen (Isolde), Katarina Dalayman (Brangäne), Ben Heppner (Tristan), Hans-Joachim Ketelsen (Kurwenal) et René Pape (roi Marc). Création en juin 1865. Sous la direction de James Levine. Production de Dieter Dorn. Représentation du 18 décembre 1999.

Pour cet opéra mythique, un des sommets absolus du répertoire, Wagner, également librettiste, a extrait quelques épisodes de la légende celtique de Tristan et Yseult pour en faire un "récit d'une passion tragique sublimée dans la mort qui se déroule dans le flot et les palpitations d'une musique immortelle" (Kobbé).

Souvent aux extrêmes du langage musical de son temps, la musique, extraordinaire, voire extatique, suscita une profonde crise d’ordre spirituel et esthétique obligeant de nombreux compositeurs à repenser leur art. L’opéra se conclue par un des plus sublimes duos d'amour jamais mis en musique, une mort de Tristan, dont Kobbé disait qu'"il n'y a pas de scène plus profondément désespérée dans toute l'histoire de la musique" et enfin un Liebestod (mort d'amour) final libérateur …

Tristan ramène la princesse irlandaise Isolde en Cornouailles pour qu'elle épouse son oncle, le roi Marke, son quasi-père. S'aimant auparavant, la prise d'un philtre d'amour, substitué par Brangäne à un philtre de mort, exacerbe leurs sentiments et les conduit à se revoir, de nuit, avant qu'un amoureux secret d'Isolde ne les trahisse … 

Après 15 ans d’absence au Met faute de voix capables de tenir ces rôles surhumains, cette production a marqué les esprits et les critiques, certains, et non des moindres, la considérant au moins égale à la légendaire version de Flagstadt ! 

L’alignement des forces est ici quasi-mythique : un orchestre sans pareil, un chef en pleine possession de ses moyens, un couple de chanteurs capables de tenir avec une apparente facilité ces rôles écrasants. 

La mise en scène, extrêmement sobre et non intrusive, et les éclairages, centrés sur les chanteurs (très beau "silhouettage" cf photo), complètent cet alignement au sommet.

Pour découvrir ou revoir ce chef d’œuvre incandescent dans la version la plus marquante depuis 1973 (Vickers/ Nilsson) ! 

 

Vendredi 14 mai
Strauss Richard Der Rosenkavalier  (le Chevalier à la Rose)
Avec Renée Fleming (la Maréchale), Christine Schäfer (Sophie), Susan Graham (Octavian), Eric Cutler (chanteur italien), Thomas Allen (M. von Faninal) et Kristinn Sigmundsson (baron Ochs). Création en janvier 1911. Sous la direction d’Edo de Waart. Production de Nathaniel Merrill. Représentation du 9 janvier 2010.

Le plus joué des opéras allemands du XXè siècle est le cinquième opéra de Richard Strauss, son deuxième «pour trois femmes » (après Elektra) et son premier dans une veine comique. Avec son librettiste, le grand écrivain Hugo von Hofmannstahl, le compositeur rêvait d’« un projet d’opéra comique à la Mozart ». Le Chevalier marque aussi musicalement une rupture stylistique par rapport au langage tonal expressionniste d’Elektra et de Salomé remplacé ici par une partition somptueuse aux cordes luxuriantes, un usage immodéré de merveilleuses valses (aucun lien avec Johann Strauss) et des mélodies à se pâmer… sans compter l’extraordinaire richesse musicale qu’apporte Strauss aux voix féminines (le trio final est un sommet absolu). 

A Vienne, vers 1740, la Maréchale (32 ans) se réveille auprès de son amant, le jeune Octavien. Un de ses cousins de campagne, le baron Ochs, vient lui demander de l’aider à trouver un jeune noble pour présenter en son nom à sa fiancée la rose d’argent de la tradition. Pour Ochs, c’est la dot de Sophie qui l’intéresse tandis que M. de Faninal, le riche bourgeois de père de la mariée, y voit le moyen de parfaire son ascension sociale et de s’allier à du sang bleu… Ochs n’a clairement aucune envie de s’arrêter à séduire d’autres jeunes femmes et, en l’espèce, Octavien qui s’était déguisé en servante avant son arrivée. Nommé chevalier à la rose, ce dernier part s’acquitter de sa fonction. La vulgarité d’Ochs répugne Sophie qui trouve le chevalier plus à son goût…Il faudra cependant punir Ochs (comme Falstaff) avant que les deux jeunes ne puissent convoler et que la Maréchale accepte que son temps soit passé.

Une somptueuse production (on a l’impression de voir du Fragonard ou du Howard), une distribution au sommet (Renée Fleming -cf photo- sans doute la plus grande Maréchale depuis Elisabeth Schwartzkopf, et Susan Graham qui y interprètent toutes les deux leur « rôle-signature »), une histoire qui allie comique et méditation sur le temps qui passe, un chef qui fait bien ressortir le côté luxuriant de la partition tout en sachant accompagner ses chanteurs font de cette production un plaisir pour les sens.

Une superbe version pour un des sommets du répertoire.

 

Samedi 15 mai
The Audition
Ce documentaire de Susan Froemke nous entraînera dans les coulisses des Met National Council Auditions, dans lesquels concourent tous les ans plus de mille chanteurs du continent nord-américain dans l’espoir d’un prix en espèces, de la possibilité de chanter sur la scène du Met (finale) et de l’opportunité de se lancer dans une grande carrière lyrique. Ce documentaire, que je n’ai pas vu, devrait s’avérer passionnant.

 

Dimanche 16 mai
Rossini Il Barbiere di Siviglia
Avec Isabel Leonard (Rosina), Lawrence Brownlee (Comte Almaviva), Christopher Maltman (Figaro), Maurizio Muraro (Dr Bartolo) et Paata Burchuladze (Don Basilio). Création en février 1816. Sous la direction de Michele Mariotti. Production de Bartlett Sher. Représentation du 22 novembre 2014.

Comment une jeune femme rusée et un jeune homme amoureux, aidé d'un barbier astucieux, parviennent à se marier malgré un tuteur barbon. Le tout avec des airs célébrissimes dans une belle cavalcade musicale.

Le chef d'œuvre comique de Rossini (1816), musicalement riche, est ici servi par deux superbes artistes (la mezzo Isabel Leonard et le ténor Lawrence Brownlee) et par un Figaro (Christopher Maltman) et un Bartolo (Maurizio Muraro) (cf photo) extrêmement efficaces tant dans la comédie que dans le chant, le tout dans une mise en scène dépouillée.

Une très belle occasion pour découvrir les beautés et raffinements du bel canto ou simplement pour s'amuser et rire ...  

 

Lundi 17 mai
Donizetti Roberto Devereux
Avec Sondra Radvanovsky (Elisabeth I), Elīna Garanča (Sara), Matthew Polenzani (Roberto Devereux) et Mariusz Kwiecień (Nottingham). Création en octobre 1837. Sous la direction de Maurizio Benini. Production de Sir David McVicar. Représentation du 16 avril 2016.

«Ce sera l’opéra de mes émotions» (Donizetti). 

Souvent comparé à la Norma de Bellini pour sa virtuosité et sa maîtrise dans l’écriture mélodique, le dernier volet de la trilogie des Tudor, Anna Bolena, Maria Stuarda le précèdent, offre un extraordinaire palette musicale à la confrontation des passions personnelles et des devoirs publics d’une Elisabeth I outragée par l’amour de son favori, Roberto Devereux, pour une « autre femme » dont elle ne découvre l’identité qu’à la fin. Si l’opéra porte le nom du favori, c’est bien Elisabeth I qui en est la figure centrale.

Sondra Radvanovsky (cf photo avec Garanca) est ici «LA» Reine, extraordinaire de bout en bout jusqu’à un acte final bouleversant. Le reste de la distribution est idéal avec des chanteurs, tous excellents, qui s’investissent pleinement dans leur rôle et bien dirigés par David McVicar qui signe une production « historisante » visuellement splendide (décor unique de salle de palais et somptueux costumes). 

Un opéra somptueux et une interprétation extraordinaire 

 


Les spectacles sont accessibles en cliquant, le jour indiqué, sur le titre de l’œuvre, à l'heure de votre choix.

 

Belles soirées (ou matinées) lyriques

 

Jean-François Bourdeaux
Président du Club Opéra

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