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Les anciens élèves et l'avenir de Sciences Po

L'Association

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10.17.2018

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Rencontre entre Frédéric Mion et Pascal Perrineau

Depuis son arrivée, en 2013, à la direction de Sciences Po, Frédéric Mion a engagé un dialogue fécond avec les anciens élèves de l'établissement, notamment avec l'Association des Alumni dont Pascal Perrineau est devenu président en 2016. À de multiples occasions ces dernières années, les alumni ont pu participer à la vie de leur alma mater. Frédéric Mion, réélu pour cinq ans à la tête de l'institution, fait aujourd'hui le constat qu'il faut aller plus loin. C'est également le point de vue de Pascal Perrineau dont un des éléments essentiels du projet, autour duquel lui-même et son équipe ont été élus, était le rapprochement avec la maison-mère.

 

Frédéric Mion,
directeur de Sciences Po

Crédit photo : Sciences Po

Pascal Perrineau,
président des Alumni de Sciences Po

Crédit photo : Manuel Braun



Sciences Po aura bientôt 150 ans. Qu'est-ce que les anciens élèves ont apporté jusque-là à cette maison ?

Frédéric Mion : Les 65 000 anciens de Sciences Po constituent une immense richesse pour notre institution, sur tous les plans : diversité des secteurs où ils sont présents, pouvoir d'impact et d'influence du fait de leurs rôles et de leurs responsabilités, rayonnement et engagement dans la vie publique et économique, présence internationale. La réputation exceptionnelle de notre établissement repose sur la qualité de leurs actions et leur fierté d'appartenir à notre communauté d'anciens. Nos Alumni participent activement à la vie de notre établissement, notamment en venant y enseigner (environ un tiers de nos enseignants sont des anciens de notre établissement) et en recrutant des Sciences Po.

Pascal Perrineau : Tout au long de l'histoire de Sciences Po, les anciens ont été une ressource décisive de l'institution et ont maintenu à la fois le lien entre les générations et l'affectio societatis qui font la force de toute communauté digne de ce nom. Ces anciens ont porté haut l'image de Sciences Po dans tous les milieux, ils ont apporté leurs compétences et leur ouverture à l'enseignement diffusé auprès des jeunes générations, ils ont souvent contribué à mettre le pied à l'étrier aux jeunes diplômés, ils ont soutenu la maison et ses évolutions... il y a peu d'institutions universitaires en France qui peuvent se prévaloir d'un tel lien entre les étudiants et leurs anciens.


Comment envisagez-vous le rôle et la place des anciens élèves dans le Sciences Po de demain ?

F. M. : J'ai la conviction que nous devons renforcer notre réseau d'anciens, pour que la communauté qu'il forme soit encore plus présente au cœur de la vie de Sciences Po. Les occasions de renforcer les liens sont légion : participation à nos événements et à nos débats, formation de nos étudiants, placement des jeunes diplômés et accompagnement dans leur carrière, contribution au financement des projets de notre maison, etc.

P. P. : Je suis persuadé qu'il faut rapprocher fortement la communauté de celles et ceux qui ont fait Sciences Po et gardent un vif souvenir de ce que l'institution leur a apporté et la communauté des étudiantes et étudiants aujourd'hui en formation. Au fond, il s'agit de la même communauté, celle des Sciences Po. Seule la date de la formation les sépare et cela est peu de choses au regard de ce qui les rassemble : une formation pluraliste et humaniste de haut niveau, une ouverture d'esprit, l'attachement à la méthode, des lieux partagés... Au fond, une culture commune. Mais, aujourd'hui, il faut trouver de nouveaux modes d'organisation et d'expression de cette communauté, peut-être plus souples et moins institutionnalisés. 


Frédéric Mion est passé par une université américaine (Princeton), Pascal Perrineau y enseigne chaque été : pourriez-vous nous parler du modèle anglo-saxon des relations Alumni/école, et nous dire si ce modèle est inspirant pour Sciences Po ?

F. M. : Dans le monde anglo-saxon, le lien de l'ancien avec son alma mater est très intense et dure toute la vie. Il est rythmé par des anniversaires de promotion et s'accompagne d'un soutien financier significatif. Le give back est un devoir très ancré, fondé sur l'idée que l'on doit quelque chose à l'institution où l'on a été formé. Cette culture est très forte et elle commence à se manifester à Sciences Po.

P. P. : Bien sûr, les deux rives de l'Atlantique sont très différentes en termes de culture associative et de rapport à l'alma mater. Tocqueville, dès le XIXe siècle, avait bien vu ce qui séparait les deux sociétés. Mais la globalisation fait lentement son œuvre ainsi que le benchmarking qui montre que la cohésion américaine entre les anciens et leur institution de formation est bien plus performante et apporte bien davantage aux deux parties : de la fierté et du lien social aux premiers, de l'aide et de la solidarité en actes à la seconde.


Sciences Po et l'Association (structure autonome, juridiquement et financièrement) ont souhaité faire appel à des conseils pour qu'ils dressent un panorama de toutes les possibilités de rapprochement entre elles. Qu'attendez-vous de cette mission ?

F. M. : Nous souhaitons en effet explorer les pistes de convergence, les évaluer, et choisir l'option la plus féconde pour l'avenir. L'enjeu est que chaque étudiant, chaque jeune diplômé – qu'il soit ou non membre d'une association d'anciens de Sciences Po – se considère comme un Alumnus de Sciences Po et qu'à ce titre il sache qu'il est un membre à part entière de la grande famille des Sciences Po.

P. P. : Ce regard de conseils extérieurs est important car il permet de présenter sereinement toutes les options du rapprochement nécessaire des Anciens de Sciences Po et de Sciences Po. Le moment est venu d'une telle réflexion et d'une ouverture de nouvelles perspectives : notre monde a changé... les étudiants d'aujourd'hui et les anciens de demain doivent avoir un mode d'organisation et de représentation qui corresponde à leur mode d'être ensemble. 


Levée de fonds : est-ce encore un mot tabou dans le dialogue d'une école avec ses anciens élèves, ou au contraire un mot admis, accepté et même valorisé ?

F. M. : Nous avons clairement un retard français lié à une longue histoire de financement public. La spécificité de Sciences Po est le caractère pluriel de ses ressources : 37 % viennent de l'État, 33 % sont issus des droits de scolarité et le reste relève de la formation continue, du financement de projets dans un cadre compétitif et, surtout, de la levée de fonds auprès des particuliers comme des entreprises. Accroître la levée de fonds suppose d'inclure pleinement les anciens dans la vie de l'institution.

P. P. : L'attachement à une institution n'est pas seulement une émotion ou une marque d'affect plus ou moins fugace, c'est aussi un geste et une implication concrète. Trouvons ensemble la place que les anciens doivent avoir au sein du nouveau Sciences Po et, alors, les anciens d'aujourd'hui et de demain feront toute leur place à l'institution qui les a formés et à qui ils doivent tant. ●

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