Sciences Po Alumni rend hommage aux diplômés mort pour la France
Restaurée grâce aux soins de Sciences Po et du Souvenir Français, la plaque commémorant les morts pour la France issus de Sciences Po (professeurs, élèves et anciens élèves) a été inaugurée le 8 novembre 2024, en présence du ministre délégué auprès du ministre des Armées et des Anciens Combattants Jean-Louis Thiériot, du président général du Souvenir Français Serge Barcellini, de la présidente de la FNSP Laurence Bertrand-Dorléac, du directeur de Sciences Po Luis Vassy et du président de Sciences Po Alumni Pascal Perrineau.
Retrouvez ci-dessous la reproduction des discours de Laurence Bertrand-Dorléac et de Jean-Louis Thiériot.
Discours de Laurence Bertrand-Dorléac
Vendredi 8 novembre 2024
Inauguration de la plaque commémorative restaurée de Sciences Po
Monsieur le Ministre délégué auprès du ministre des Armées et des Anciens combattants, cher Jean-Louis Thiériot,
Monsieur le Directeur, cher Luis, Vassy
Monsieur le Président du Souvenir Français, cher Serge Barcellini,
Monsieur Président des Alumni, cher Pascal,
Chers amis,
Chers étudiants,
Nous passons devant les monuments aux morts sans y prêter attention. Ils sont devenus des personnages familiers immobiles que nous délaissons pour regarder tout ce qui est en vie et en mouvement, et comment ne pas voir là un mouvement bien compréhensible ?
Aujourd’hui, nous voulons pourtant nous arrêter. Nous voulons nous souvenir. Nous voulons comprendre ce que veut dire cette plaque couverte de noms installée depuis 1919 dans le hall du 27 rue Saint-Guillaume de l’École libre des sciences politiques qui est devenue Sciences Po. Le marbre de cette plaque, au fur et à mesure du temps qui passait, avait jauni, la rouille menaçait d’occulter jusqu’aux êtres dont les noms sont ici gravés. Un beau travail de rénovation a été accompli par les artisans auxquels nous avons confié cette tâche grâce à l’effort constant de nos équipes, grâce au soutien précieux de l’association le Souvenir Français et de son président Serge Barcellini. Tout cela permet de lire à nouveau clairement les noms de tous ceux dont le destin fut à la fois tragique et héroïque : les noms de nos anciens professeurs et de nos élèves qui sont morts pour la France dans les guerres du 20e siècle.
Partout en Europe, partout en France, dans nos villes, dans nos villages, sur nos bâtiments officiels, nous rencontrons des monuments ou ce genre de plaques. Mon confrère historien, Antoine Prost, évoque à leur propos une « liturgie républicaine ». Chacun sait que notre ancêtre, l’École libre des sciences politiques, est née dans la foulée de la défaite de 1871, à la fin de la guerre franco-prussienne. Selon son fondateur, Émile Boutmy, disait que cette école devait former les futurs dirigeants administratifs, économiques, les futurs cadres français. Elle devait « réformer l’éducation politique et la formation intellectuelle ».Elle devait également, je reprends les propos d’Eugène d’Eichthal, le troisième directeur de l’École libre, qui traduisait Aristote et citait donc volontiers Xénophon : elle devait former « ceux qui savent entraîner leurs soldats à les suivre au travers des flammes, au milieu de tous les dangers. »
Nous avons changé d’époque voire, à bien des égards de mentalité, mais la guerre se rapproche un peu partout autour de nous. Il nous faut repenser à ces deuils anciens, qui ressemblent forcément à ces deuils contemporains dont l’actualité se remplit. Notre école fut cruellement endeuillée comme toutes les autres. Même quand nous ne sommes pas historiens, il nous faut penser à ces vies fauchées le plus souvent dans leur extrême jeunesse.
Pensons aux deux frères Dansette (l’un mort à 19 ans, en août 1915 ; l’autre à 22 ans, en octobre 1916) ; Jean Berguerand, diplômé en 1934, mort quelques jours après la déclaration de guerre, en septembre 1939, à 24 ans ; à André Dubieff, diplômé en 1914 et mort dès les premiers assauts, en août de la même année, à 24 ans ; À Gérard Dehesdin, élève de la section générale, mort le 18 juin 1940, à 17 ans ; À Pierre Robert Arrighi, diplômé en 1942, mort en déportation à Mauthausen en mars 1944, à 23 ans ; il fut compagnon de la Libération ; À Jacques Bingen, diplômé en 1931, délégué général par intérim du général de Gaulle en France, qui, plutôt que de parler sous la torture, s’est donné la mort en mai 1944, à 36 ans, peu après son arrestation par la Gestapo. Pensons à Simone Bernard, seule femme figurant parmi tous ces hommes, diplômée en 1937, engagée dans les Forces françaises de l’intérieur, morte en juillet 1945, à 31 ans, « d’une maladie contractée au service des déportés ». La liste est bien plus longue sur cette plaque, de tous ces jeunes gens tombés pour leur pays. Forcément, nous avons perdu bien des talents, des esprits et des caractères dans les guerres. Un de nos plus grands professeurs de l’École libre, Élie Halévy notait dans cet esprit en 1915 : « Heureux ceux qui n’ont pas de fils ! Ou bien heureux ceux qui, ayant des fils, ont l’âme assez sublime pour les élever dans la perspective d’un nouveau massacre ! ».
Il faut évidemment continuer à dialoguer avec l’Ange de l’Histoire de Walter Benjamin qui disait de lui que « son visage est tourné vers le passé. Là où nous apparaît une chaîne d’événements, il ne voit, lui, qu’une seule et unique catastrophe, qui sans cesse amoncelle ruines sur ruines et les précipite à ses pieds. »
Mais l’histoire est inventive et elle ne se répète jamais deux fois de la même façon. Et surtout, surtout, nous n’avons pas les moyens de désespérer. Nous n’avons plus les moyens de désespérer. Dans cette époque riche en conflits et en tragédies qui attisent les passions et font souvent perdre la raison, le rôle de Sciences Po est de s’attacher à observer et à analyser, par les sciences humaines et sociales, la Paix et [la] guerre entre les nations, pour reprendre le titre d’un ouvrage célèbre de Raymond Aron. La paix et la guerre, mais aussi bien d’autres questions fondamentales. Notre vocation est de tenir fermement à nos principes et à notre feuille de route : étudier, apprendre, chercher, s’interroger, raisonner, dialoguer. Je ne pense pas qu’il y ait de plus juste hommage aux morts que de réaffirmer notre volonté d’œuvrer à bien armer intellectuellement nos démocraties. Je sais que notre nouveau directeur, Luis Vassy, s’y attelle quotidiennement et je l’en remercie infiniment.
Dans un livre, publié en 1902, Les doctrines de haine, Anatole Leroy-Beaulieu, le deuxième directeur de Sciences Po, écrivait : « L’ennemi de l’heure présente, c’est l’esprit de haine et d’intolérance ». 120 ans plus tard, ses mots sonnent juste.
Pour conclure, je voudrais adresser à nouveau mes vifs remerciements et ma chaleureuse reconnaissance à celles et à ceux qui, à Sciences Po et hors de nos murs, ont contribué à ce travail de restauration qui nous permet aujourd’hui d’honorer à nouveau ces étudiants et ces professeurs de Sciences Po, morts pour la France, c’est-à-dire pour une certaine idée de la liberté, de l’égalité et de la fraternité. Ces absents restent parmi nous. Ils nous habitent à leur façon, comme tous les morts qui nous sont chers. Ils font pleinement partie de notre raison d’agir.
Discours de Monsieur Jean-Louis Thiérot, Ministre Délégué auprès du Ministre des Armées et des Anciens Combattants
Inauguration de la plaque commémorative de Sciences Po restaurée par le Souvenir Français
Le 8 novembre 2024
- Seul le prononcé fait foi -
***
Madame la Présidente,
Monsieur le Président,
Monsieur le Directeur,
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Se retrouver ici est une émotion toute particulière, pour un moment comme celui-là.
A l’heure où je reviens à Sciences Po Paris, où j’ai d’abord étudié puis ai fait un certain nombre de conférence, je pense à certains de mes maîtres, en particulier à Jacques Rupnik et à ses cours sur la singularité de l’Autre Europe.
Il nous apprenait à penser, il nous apprenait à avoir une pensée libre, à nous décentrer, à entendre la parole de l’autre, sans jamais nous faire stockholmiser.
Ses cours me servent à chaque fois que je me déplace en Europe orientale pour démontrer la force des pensées ouvertes et libres.
A proximité de cette porte, avant la Péniche et l’amphi Boutmy qui ont vu passer des générations d’élèves, se trouve une plaque.
Cette imposante plaque de marbre qui dit : « Professeurs, anciens élèves et élèves de l’école libre des Sciences politiques morts au champ d’honneur 1914-1918 ; morts pour la France 1939-1945 ; Algérie ».
Grâce à l’action du Souvenir Français, qui vient d’en financer la restauration et dont je salue l’importance de l’action partout dans notre pays, penchons-nous sur la longue liste des noms qui y sont gravés.
Recueillons-nous devant l’héroïsme de ces Anciens et, parce que c’est la règle à Sciences Po, pensons ensemble.
Ce matin, je souhaite vous partager quelques idées autour de trois axes :
1) Je voudrais tout d’abord vous rappeler, parce que ce n’est jamais inutile, que Sciences Po n’est pas n’importe quelle école : c’est celle du redressement français.
2) Ensuite, la rénovation de cette plaque commémorative me permettra de me souvenir avec vous du fait que les élites qu’elle a formées, nos élites, ont payé le prix du sang.
3) Enfin, je m’autoriserai quelques réflexions sur le sens du terme « élite » pour les temps d’aujourd’hui.
***
Moins d’un an après avoir déclaré la guerre à la Prusse, la France, défaite à Saint-Privat, à Gravelotte, à Sedan, est vaincue.
L’Empereur abdique, la IIIème République naît dans l’incertitude.
Et, après de longues semaines de résistance jusque sur la Loire, le gouvernement de Défense nationale n’a pas d’autre choix que de déposer les armes en janvier 1871.
Les bombardements quotidiens et l’enchaînement des échecs militaires ont rendu notre pays exsangue.
Il a perdu 140 000 de ses enfants et se retrouve amputée de l’Alsace et de la Moselle.
La débâcle dans laquelle plonge le pays provoque une profonde crise de confiance, germes d’une guerre civile à Paris qui se terminera dans le feu et le sang au Père Lachaise.
Immédiatement, les hauts dirigeants français sont pointés du doigt : on leur reproche, non sans raison, leur manque de clairvoyance et leur arrogance dans la gestion du conflit.
Partant de constat, Emile Boutmy, qui avait servi pendant la guerre comme capitaine du génie auxiliaire de l’armée de Paris, décide de réagir.
Il partage l’opinion générale selon laquelle la défaite est d’abord la faillite de l’intelligence française et de la formation de ses élites dans tous les secteurs de la vie publique. La défaite, pensait-on alors, c’est celle de l’université française, celle aussi du haut Etat-major et de son école. Bref, pour reprendre le mot d’Ernest Renan, il faut au pays une reforme intellectuelle et morale.
Dès 1872, il s’entoure d’universitaires de renom parmi lesquels Ernest Renan, que j’évoquais, ou François Guizot et fonde l’Ecole libre des sciences politiques.
Son objectif, je cite, est de « redonner une tête au peuple », que ce peuple divisé et désuni retrouve une classe dirigeante à la hauteur des enjeux contemporains.
La culture classique reste un socle, évidemment, mais, ajoute-t-il, « le moins que l’on puisse attendre d’un homme cultivé, c’est qu’il connaisse son temps ».
Ce constat, d’autres hommes éloignés d’origine et d’esprit, comme Albert de Mun, Melchior de Vogüé ou Ernest Lavisse le partagent, et cette fin de siècle voit les idées se multiplier au profit de la jeunesse. Les Armées aussi en tirent un constat : en 1876, le général Courtot de Cissey, alors ministre de la guerre, crée l’Ecole supérieure de guerre afin de former des officiers d’état-major enfin à la hauteur.
La Troisième République procède également à la restauration des universités, qui avaient été supprimées en 1798 pour, le pensait-on, abolir les privilèges.
Partout, à tous les étages, la réforme intellectuelle et morale se met en place.
Ces lieux gagnent le surnom de « fabrique des élites », au regard du très grand nombre d’intellectuels français et internationaux passés sur ses bancs.
En 1945, lorsque le Gouvernement provisoire de la République française veut s’atteler à la réforme de la fonction publique, il s’attache non seulement à la création de l’Ecole nationale d’administration mais aussi à la refondation de Sciences Po, pour que l’administration de mission qui doit succéder à l’administration de gestion, pour reprendre les mots de Michel Debray, se retrouve avec des préparations à la hauteur autour de notre République refondée.
***
L’Ecole libre des Sciences politiques, qui devient pour tous « Sciences Po », forme aux sciences politiques, à la sociologie, à l’économie, au droit ou à l’histoire.
Autant de disciplines qui inculquent le sens de l’Etat et de l’intérêt supérieur du pays, même si la section « Service public » s’appelle désormais d’un autre nom, heureusement complétée, et je le salue, par la création d’une spécialité « Sécurité et Défense ».
La longue liste de noms gravés sur cette plaque nous en apporte la preuve.
Hélas, nous ne saurions l’égrainer intégralement. Prenons seulement deux noms.
Pierre Leroy-Beaulieu, homme politique, enseignait ici la géographie économique. Devenu capitaine d’artillerie durant la Première Guerre mondiale, il décède des suites de ses blessures en 1915, au nord de Soissons.
François d’Humières, étudiant dans ces murs, y organisait dès 1942 des groupes de résistance et prenait part à différentes actions de sabotage à Paris. Après la Libération, il s’engage dans les Commando de France pour participer à la bataille d’Alsace. C’est alors qu’il monte à l’attaque de Durrenentzen qu’il est fauché par une rafale de mitrailleuse.
Engagés ou mobilisés, ces hommes ont remis leur vie sur l’autel de notre patrie avec la conscience de porter un idéal plus grand qu’eux.
Et ils l’ont fait toutes les fois que la France a eu besoin d’eux : lors de la Première Guerre mondiale, lors de la Seconde, lors de la guerre d’Algérie.
Cela ne veut pas dire qu’ils n’ont pas éprouvé, au fond d’eux-mêmes, la peur, la colère ou le doute.
En revanche, cela démontre qu’ils n’ont pas failli face à leurs devoirs.
A ce titre, on prête à Raoul Dautry, qui fut professeur ici, cette citation éclairante : « Appartenir à l’élite, cela ne dépend pas de la fonction mais du caractère, de la valeur spirituelle de l’homme ».
Et ici, à Sciences Po, reprenant la vieille alliance héraldique chère à Machiavel du lion et du renard, c’est l’ambition qui vous est donnée en partage.
En vous appropriant les enseignements reçus, par des lectures intenses et des conversations passionnées, vous savez qu’il faut savoir abandonner son confort pour défendre avec courage vos ses opinions, accepter de périr plutôt que d’être battu sans rien faire.
Et, parfois, quand l’impérieux devoir dicté par le salut suprême du pays le commande, de prendre les armes pour défendre nos familles, notre sol et nos libertés.
Ces trajectoires individuelles ont servi notre destin national.
N’oublions jamais ces mots du général de Gaulle en 1942 : « Le ciment de l'unité française, c'est le sang des Français qui (...) continuent à mourir pour la France. De ceux qui n'ont pas voulu connaître, suivant le vers de Corneille, « la honte de mourir sans avoir combattu » ».
Merci au Souvenir Français, qui fait tant pour la mémoire de nos soldats disparus, d’avoir pris soin de cette plaque.
C’est notre trésor commun.
Si l’élite d’une nation est son phare, ce marbre nous raconte que la lumière de Sciences Po ne s’est jamais éteinte jusque-là.
***
Enfin, je tiens à vous livrer quelques réflexions sur le sens du mot « élite », d’autant plus nécessaires que notre monde est confronté plus que jamais à l’incertitude, aux tensions internationales et à la guerre qui apparaît à nouveau au cœur de l’Europe.
Je pense bien sûr à l’Ukraine.
Le courage, vertu des temps difficiles, sera plus que jamais nécessaire et c’est aussi aux élites d’en porter le flambeau.
Trop souvent, on a voulu opposer ce mot à notre principe d’égalité, ce qui l’a paré d’une connotation négative ; c’est une erreur, une grave erreur.
Je vous félicite, Monsieur le Directeur, du retour d’une épreuve d’entrée car intégrer une école comme Sciences Po n’est un dû pour personne.
Sans nier le poids des mécanismes sociaux, dont je suis évidemment conscient, je veux dire que c’est un prestige qui se mérite, par le travail, par l’entraide, et je sais que vous en êtes convaincus.
Aux candidats de trouver en eux les ressources, de faire les efforts nécessaires pour entreprendre, à nous les Anciens, aux institutions publiques et privées de les aider, de les encourager, pour qu’ils puissent rejoindre, par leurs mérites et nos efforts communs, ce temple de la méritocratie républicaine et de l’aristocratie du savoir.
Dans son roman intitulé Connemara, Nicolas Mathieu raille l’orgueil que l’on prête aux étudiants d’ici. Il dit : « Quoi qu’il en soit, il avait fait Sciences Po. Il ne fallait en général pas attendre dix minutes avant qu’il le rappelât ».
Je crois, bien sûr, que quiconque a réussi à rejoindre cette école peut en éprouver de la fierté. Toutefois, il ne s’agit que d’une première marche qui ne garantit en aucun cas et ne légitime en aucun cas, de plein droit, de faire partie à vie de l’élite française.
Qui vise la gloire embrasse ses servitudes.
Comme ceux dont les noms sont figés pour l’éternité sur cette plaque, il faut prendre sa juste part dans la société. Porter le sac et le fardeau. Cela passe par le travail, l’abnégation et, parfois, le sacrifice.
Le sens de l’Etat que j’évoquais tout à l’heure se nourrit de connaissances livresques, bien sûr, mais il est d’abord et avant tout une valeur qui s’éprouve au plus profond de soi et qu’il faut incarner.
Se mettre au service de son pays est un acte fort, solennel, engageant.
Intégrer son élite, du côté du secteur public ou du secteur privé pour bâtir sa richesse, c’est accepter de prendre sa part.
Et ce fardeau des chefs, c’est celui des élites qui ne sont pas que des managers, qui doivent d’abord être des chefs avec tout ce que cela signifie.
Il faut ne jamais perdre de vue l’horizon, tracer le cap et conduire, inlassablement.
Ici comme dans d’autres cercles, ce qu’écrivait le maréchal Lyautey à propos du rôle social des officiers est vrai : nos élites sont « (...) appelé(es) par la confiance de la patrie moins encore à préparer pour la lutte les bras de tous ses enfants qu’à discipliner leurs esprits, à former leurs âmes, à tremper leurs cœurs (...) ».
Voici qui requiert d’avoir de l’énergie et du courage.
L’énergie de donner l’impulsion et de bouger les lignes ; le courage de ne pas sombrer dans une démagogie stérile et de ne pas se laisser endormir par des idéologies qui détournerait de l’honnêteté intellectuelle et de la nuance.
Le courage de proposer, d’accepter la légitime pluralité des sentiments de ceux qui sont vos compatriotes, de débattre, à visage découvert, en s’écoutant plutôt qu’en interdisant l’accès à des réunions.
Je sais, Monsieur le Directeur, que cette liberté d’esprit qui forme la solidité des âmes, vous y êtes très attaché.
L’élite de la France a besoin d’esprits ouverts, connaissant leur passé et capables de regarder vers l’avant avec un objectif : servir au mieux et faire grandir ceux qui leur sont subordonnés.
Elle ne doit pas oublier non plus, ainsi que l’affirmait Chateaubriand à propos de l’aristocratie de l’Ancien Régime que « l'aristocratie a trois âges successifs : l'âge des supériorités, l'âge des privilèges et l'âge des vanités. Sortie du premier, elle dégénère dans le second et s'éteint dans le dernier ».
A vous, l’aristocratie du savoir, de veiller à rester dans celle-ci.
***
Chers jeunes, à votre tour, fidèles à l’esprit de redressement des origines et à l’engagement des glorieux Anciens dont les noms sont devant vous, c’est à vous d’écrire cet avenir dont Bernanos disait : « L’avenir est quelque chose qui se surmonte. On ne subit pas l’avenir, on le fait ».
Face aux idéologies qui menacent de morceler notre pays en « archipel français » pour reprendre les mots de Jérôme Fourquet, face aux tensions internationales qui déchirent le monde, face aux risques de l’avenir, ayez le courage de la résistance et retrouvez votre rôle de gardiens de l’unité nationale, de l’unité européenne.
C’est votre héritage et votre devoir.
Là est votre mission ; là réside votre grandeur.
Vive la République,
Vive la France.
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