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Service de presse entre Alumni #13 : Les enfants maigres, de Tang Loaëc

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Club Littérature

03.20.2024

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« Ce livre m’a bouleversée » : Hélène Bermond (promo 1986) nous explique pourquoi elle a aimé Les enfants maigres de Tang Loaëc (promo 1990), paru le 2 mars 2024 aux éditions Passiflore.


Le livre


L'auteur

Tang Loaëc ; photo Babelio 


Français de partout et d’ailleurs, Tang Loaëc a un père breton, une mère chinoise, une femme russe. Il a vécu en Chine, à Saint-Pierre-et-Miquelon, en Écosse et en France où il réside aujourd’hui. Ancien critique littéraire, il dirige des entreprises dans le domaine de l’assurance, à Shanghai et à Paris. Il a lancé en Chine des communautés pour aider à retrouver et sauver des enfants volés, source d'inspiration pour son roman Les enfants maigres. Il est également l'auteur d’une Source parmi les ruines (Prix du Livre Numérique 2016), des Hommes suspendus et de la Vengeance de l’Aulne.


Présentation du roman par la maison d'édition

« Eux ce sont les gras. Le terme désigne tant les chiens que les gardes. Nous avons pour eux le même jargon, la même haine. Certains courent à quatre pattes, d’autres sur deux jambes, c’est toujours après nous. »

Dans l’usine où Xiao Mi travaille, les maigres sont nombreux ; des enfants volés qui produisent douze heures par jour des coques de téléphones à moindre coût. À vingt-sept ans, il sera libre. Il en a quatorze.

L’autre voix, c’est celle d’un père au cœur arraché qui sillonne la Chine depuis huit ans, ville après ville, usine après usine, à la recherche de son fils kidnappé.

Un livre engagé, qui reflète avec beaucoup d’émotion la réalité de dizaines de milliers d’enfants enlevés chaque année en Chine.


Trois extraits choisis par Hélène

Comment savoir la vie d’un enfant disparu ? Et si mon fils avait été vendu et adopté par un couple stérile qui l’aurait bien traité ? Lorsque l’on n’a aucune piste, tout peut être imaginé. Parfois, je me raccroche à ces espoirs, je m’invente des histoires où il aurait été plus chanceux que d’autres, dans une famille adoptive qui aurait acheté un enfant à des trafiquants pour avoir une descendance, des parents de remplacement qui l’auraient aimé presque comme je l’aurais aimé moi-même.
Je baisse les yeux et je fais ce qu’il dit. Il donne des ordres, ça va. C’est tout ce que je voulais. Un gras qui donne des ordres stupides c’est moins dangereux qu’un gras qui ne sait plus ce qu’il doit faire. Comment pourrions- nous fuir de toute façon ? Lorsque je descends du camion, mes jambes me font défaut, je m’étale sur le sol puis me relève à temps pour aider le suivant à descendre. Aucun d’entre nous ne pourrait courir. La corde qu’ils nouent autour de nos chevilles qui nous attache l’un à l’autre et à l’un des gardes, est la précaution la plus absurde qu’ils aient pu imaginer face à des enfants à bout de forces.
Enfant, comment veux-tu que je t’appelle ?
Il m’observe défiant, comme si je venais de lui lancer une méchanceté. J’ai sans doute manqué de tact. Comment savoir si le nom qui figure sur les documents de l’avocat est le vrai ?
Je ne sais pas ! Tu crois qu’on nous donne nos vrais noms dans les usines ? Tu crois que je sais qui je suis ? Je n’ai pas de parents. Je suis une bête qu’on épuise et qu’on bat.
Il a raison. Mais il faut bien un nom pour vivre. Il faut lui en trouver un. C’est ce que je lui dis et sa réponse ne tarde pas.
Donne-moi le tien. Si tu veux mon bien, donne-moi le tien. Tu es la personne la moins mauvaise que j’ai croisée dans ma vie. Adopte-moi.

L'avis d'Hélène

Un livre bouleversant et criant de vérité

Ce livre m’a bouleversée. 

J’ai découvert une réalité dont je ne soupçonnais ni l’ampleur ni la noirceur : celle des enfants volés, de l’univers concentrationnaire implacable dans lequel les mafias les font vivre. Un système bien rodé sur lequel probablement, nous Occidentaux, n’avons pas très envie d’ouvrir les yeux.

Le roman, criant de vérité (l’auteur connait à l’évidence bien le sujet) nous fait partager le drame vécu par trois personnages dont les destins vont bien sûr se croiser.

Les deux narrateurs, d’abord, l’un et l’autre analysant avec lucidité les situations qu’ils vivent et posant les faits qui donnent au récit toute son authenticité : le père qui sacrifie tout depuis huit ans à sa quête au succès improbable ; un enfant volé dont on partage la vie de souffrance, conscient de ne pas avoir d’avenir mais qui va toujours de l’avant pour survivre 

Et ensuite, un deuxième enfant, Xiao Que qui deviendra Er Sheng (le « deuxième né »), qu’on découvre dans le récit des deux narrateurs, qui va peu à peu créer le lien qui les rapproche. Une autre victime de ce système maléfique, qui s’en échappe et veut croire en l’espoir d’une vie meilleure.


Une histoire terrible racontée avec douceur

Au-delà du récit lui-même, l’émotion passe par une langue à la fois simple et lumineuse, ciselée pour décrire aussi bien l’enfer que les rares moments de répit.

Ce roman témoigne de toute la misère du monde sans jamais être lourd. C’est une histoire terrible racontée avec douceur. Le happy end final est tout en retenue, presque en demi-teinte ; mais il confirme que la résilience est possible même dans les pires situations.

 

Pourquoi ce livre plaira aux Alumni de Sciences Po

Ce livre offre un regard différent sur la Chine d’aujourd’hui. Il sort des analyses économiques et politiques froides et classiques. Le choix de la forme romanesque, qui aurait pu « affaiblir » la dénonciation, lui donne au contraire une force particulière. 

Les enfants maigres questionne aussi nos propres comportements. Car au final, les clients de ces usines clandestines, c’est nous !!!

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