Henri Madelin vient de disparaître le 8 avril à Lille des suites du Coronavirus.
C’était un ami cher que je connaissais depuis quarante ans. Étudiant dans les années 1970 à l’Université François Rabelais de Tours, j’avais connu son frère étudiant en médecine. Cette famille blésoise nombreuse et très unie m’avait introduit à la connaissance de son frère aîné Henri. Il avait mené des études de philosophie et de théologie au scolasticat jésuite de Vals près le Puy puis à Douala au Cameroun et enfin au théologat de Fourvière. Hésitant entre l’ENA et son engagement religieux, il avait choisi ce dernier et était ordonné prêtre de la Compagnie de Jésus en 1967. Le jeune homme était très attiré par la science politique et était sorti diplômé de l’Institut d’Etudes politiques de Paris en 1956 tout en faisant des études de droit et d’économie politique. Son cheminement religieux ne l’éloigna pas de son intérêt pour les sciences sociales et la science politique. Il obtint ainsi en 1971 sa thèse de science politique, préparée sous la direction de Jean-Claude Casanova, sur « Pétrole et politique en Méditerranée occidentale» qui sera publiée en 1973 chez Armand Colin. Il prendra en 1973 la direction de l’Action populaire qui deviendra le Centre d’études et de recherches en action sociale (CERAS) et sera en même temps enseignant à Sciences Po. Des générations d’étudiants gardent un souvenir ému de cet homme si attentif, ouvert au monde et enraciné si fortement dans une foi inébranlable. De 1979 à 1985 il sera Supérieur provincial des Jésuites pour ensuite présider de 1985 à 1991 le centre Sèvres, lieu important de formation intellectuelle et d’interface entre les religieux et les laïcs. Ensuite, il deviendra aumônier national du Mouvement chrétien des cadres et des dirigeants puis, à partir de 1995, rédacteur en chef de la revue Etudes. Au début des années 2000, il devint le collaborateur de l’Office catholique d’information et d’initiative pour l’Europe (OCIPE) à Bruxelles et à Strasbourg. Malgré ses très nombreuses activités, Henri était toujours disponible pour l’écoute de ses proches, pour réfléchir ensemble à la manière dont la foi chrétienne et l’engagement social et politique s’articulent et se fécondent, pour guider les interrogations métaphysiques qui interpellent nos vies ordinaires et pour accompagner les deuils et les détresses. Je me souviendrai toujours de sa parole forte et sensible lors des messes de funérailles de Georges Lavau et de Richard Descoings. Aujourd’hui, cher Henri, tu nous as quittés et ton esprit de finesse, ton empathie, ton sourire si bienveillant, tes mots justes, ta modestie d’homme de foi vont beaucoup nous manquer. Heureusement tu nous laisses un message fort pour poursuivre notre route. Ecoutons ta parole : « Vivre dans l’espérance, c’est marcher sans se retourner en arrière, se remettre debout quand on tombe ou quand l’envie vous prend de rester couché ». A quelques jours de Pâques, nous entamerons ce passage avec en tête et au cœur ton message et tes mots qui résonnent.
Pascal Perrineau
Président de Sciences Po Alumni
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