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La Fille de Madame Angot TCE 30/06/2021 Note de présentation

27/06/2021

Le compositeur

Né le 3 juin 1832 à Paris, Charles Lecocq s’est fait remarquer en remportant à 24 ans le premier prix du concours d’opérette organisé par Jacques Offenbach sur livret imposé, ex-aequo avec son condisciple du conservatoire Georges Bizet. S’ensuivra une série d’opérettes et d’opéras comique qui connurent un certain succès.

La vraie percée commencera lorsque, réfugié à Bruxelles après la défaite de 1870, il compose une première œuvre, Les Cent Vierges (1872) qui connut un très gros succès local et international. Sa deuxième pièce pour le théâtre bruxellois, La Fille de Madame Angot (1872), connaîtra plus de 400 représentations d’affilée et un triomphe planétaire et placera Lecoq en tête de liste des compositeurs de musique de théâtre jusqu’alors dominée par l’opéra bouffe aux excentricités parodiques d’Offenbach et d’Hervé.

Un troisième succès bruxellois et international (Giroflé-Girofla) mènera à un retour à Paris sous un arc de triomphe, suivi encore par une demi-douzaine de très grands succès jusqu’en 1883. Par la suite, ses œuvres ne connaîtront plus qu’un succès d’estime.

Lecocq meurt à Paris le 24 octobre 1918, deux mois avant la reprise triomphale, à l’Opéra-Comique, de La Fille de Madame Angot.

Il laisse la réputation d’un maître de la musique de théâtre légère, emplie d’un humour plus fin que les œuvres burlesques, à la limite d’une allègre vulgarité, d’Hervé.

L’œuvre 

 « Après la rude épreuve que le pays vient de subir », et le désir de « relèvement de la France meurtrie », l’opérette étant accusée d’avoir contribué à la décadence du pays et donc à la défaite, les librettistes (Clairville, Paul Siraudin et Victor Koning) eurent pour instructions de renoncer aux grivoiseries antérieures et de viser une bonne humeur populaire plus retenue. Ils produisirent un livret bien structuré et de grande qualité situant la pièce dans une période historique, le Directoire, célèbre pour ses extravagances vestimentaires (tenue antique pour les femmes, redingotes très courtes et larges collets pour les hommes notamment) et verbales (non prononciation des « r » jugés trop rudes !) en réaction à la période noire de la Terreur.

Personnage de poissarde enrichie forte en gueule, madame Angot a connu à cette époque une gloire théâtrale considérable dans une série de comédies à rebond d’Antoine-François Eve (dit Maillot) auxquelles l’air d’Amarante au 1er acte fait allusion (Mme Angot dans son ballon, au sérail de Constantinople, au Malabar …) et dont cette pièce constitue une « suite » lyrique.  Le livret intègre des personnages historiques, directement (le contre-révolutionnaire Louis Ange Pitou, l’actrice aux succès multiples Anne Françoise Elizabeth Lange) ou par allusion (le Directeur Paul Barras, le général Augereau) à cet environnement du Paris de la Halle et de la petite bourgeoisie.

Combiné avec une musique qui enchaîne chansons et ensembles mélodieux, cette œuvre, pleine d’originalités musicales et de nombreux « tubes » démontre un grand sens théâtral. Elle a marqué une nouvelle ère dans l’évolution du genre léger et est depuis devenue une des pièces les plus durables de l’opérette de la fin du XIXè siècle. Encore souvent joué et beaucoup chanté au XXè siècle, elle a été victime de la fermeture de l’Opéra-Comique en 1972 et de la désaffection de l’opérette depuis les années 1980 et n’a plus été donnée à Paris depuis 1984 (Châtelet).

Dans sa grande Encyclopédie du théâtre musical, le critique Kurt Gänzl écrit que La fille de Madame Angot est, avec Les Cloches de Corneville de Robert Planquette, « le produit le plus réussi de la scène musicale de langue française » au cours des trois dernières décennies du XIXè siècle.  « Même des pièces comme HMS Pinafore et Die Fledermaus (la Chauve-Souris), largement couronnées de succès … n'ont pas eu la carrière internationale énorme de l'opérette de Lecocq ». 

Opérette ou opéra-comique comme l’annonce le sous-titre « opéra-comique » ? Voici la définition proposée par une spécialiste du sujet :

L’opérette est une œuvre lyrique qui ne se prend pas au sérieux et cherche avant tout à divertir son public sans le fatiguer. Elle se définit mieux par les lieux où elle est représentée que par les sous-titres des livrets ou des partitions. Relèvent du genre léger non seulement les opérettes, vaudevilles-opérettes, opéras-bouffes dûment affichés, mais aussi les opéras-comiques donnés dans des salles de spectacle dévolues au genre gai. (Pauline Girard in Histoire de l’opéra français t2, p552)

L’argument

I. Les Dames de la Halle, qui ont recueilli, à la mort de Madame Angot (couplets d’Amarante Marchande de marée, …), sa fille, Clairette, lui ont choisi un mari, le perruquier Pomponnet, sans savoir qu’elle est amoureuse du volage chansonnier Pitou, sans cesse arrêté pour ses couplets provocateurs contre le gouvernement mais chaque fois mystérieusement relâché.

Pour échapper au mariage, Clairette a l’idée de se faire emprisonner et pour cela de chanter la dernière chanson de Pitou (Jadis les rois, race proscrite) dévoilant les amours de Mlle Lange avec le Directeur Barras, chanson tout juste remaniée suite à une demande du financier Larivaudière, un autre amant.  Elle est immédiatement mise sous les verrous.

II. Mlle Lange, entourée de Me’veilleuses dans son salon, voudrait bien connaître Clairette dont Larivaudière vient de raconter l’arrestation. Mlle Lange doit recevoir des conspirateurs royalistes mais ceux-ci sont devancés par Pomponnet, coiffeur de Mlle Lange, qui veut la libération de sa promise "tellement innocente".  Barras ayant fait libérer Clairette, les deux femmes se rencontrent et se reconnaissent comme d’anciennes amies de pensionnat. Ange Pitou arrive et Mlle Lange cache Clairette pour le recevoir. Il découvre alors qu’elle est la mystérieuse femme qui obtient ses libérations et ils tombent tous deux sous le charme de l’autre. Larivaudière enrage de jalousie. Mlle Lange lui fait croire que la présence du chansonnier est liée au complot qui se trame et pour lequel arrivent un groupe d’Inc’oyables (en perruques blondes et collets noirs), avec les troupes du général Augereau aux trousses. Sans se laisser démonter, la maîtresse de maison prétexte un grand bal pour le mariage d’Ange Pitou et de Clairette. Cette dernière comprend alors qu’elles sont rivales et jure de se venger.

III. Clairette a invité Mlle Lange et Ange Pitou, au bal Calypso à Belleville leur faisant croire qu’ils se donnaient rendez-vous l’un l’autre. Pour faire bonne mesure, elle a aussi convié Larivaudière et Pomponnet. Le tête-à-tête (duo des lettres Cher ennemi que je devrais haïr) est surpris par Clairette menant à un affrontement entre les deux rivales (Ah, c’est donc toi, Madam’ Barras) qui se calme au nom de leur amitié ancienne. Clairette abandonne Ange Pitou et va épouser le fidèle Pomponnet. Ange Pitou lui ne renonce pas à conquérir un jour la jeune fille (Elle m’échappe, mais j’espère qu’elle fera comme sa mère, attendons, nous verrons) ni Mlle Lange à ses « protecteurs » … et Larivaudière commencera par payer la facture.

Les personnages et leurs interprètes

Clairette Angot (soprano) : Anne-Catherine Gillet  
Mademoiselle Lange (mezzo-soprano) : Véronique Gens
Pomponnet (ténor) : Artavazd Sargsyan
Ange Pitou (baryton) : Mathias Vidal
 Larivaudière (baryton) Matthieu Lécroart

Amarante / Babette / Javotte (soprano) : Ingrid Perruche 

Louchard (basse) : Antoine Philippot  
Trenitz (ténor) : Flannan Obé
 Cadet / Un Incroyable / Un Officier (ténor) : David Witczak

Le concert est co-produit avec le Palazzetto Bru Zane-Centre de musique romantique française dont la mission est de faire redécouvrir des œuvres méconnues et des compositeurs oubliés et qui a été à l’origine de superbes découvertes ou redécouvertes ces dernières années.

Pour aller plus loin 

CD ou streaming : 

  • Colette Riedinger, Suzanne Lafaye, Gabriel Bacquier, Bernard Alvi. Chœur et orchestre symphonique de Paris, direction Richard Blareau Decca 1958
  • Mady Mesplé, Christiane Stutzmann, Bernard Sinclair, Charles Burles. Chœurs du Théâtre national de l’Opéra, direction Jean Doussard Warner 1973

 

Jean-François Bourdeaux

 

 

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