Samedi le 21 mars, l’Association des anciens de Sciences Po en Chine a lancé un appel à dons aux anciens chinois et à tous les autres anciens vivant en Chine, pour acheter des masques médicaux et les envoyer aux services hospitaliers en France qui étaient sous une pression de plus en plus grande.
En deux jours, l’association a reçu des dons d’un montant total de 96, 358 CNY (environ 12, 335 euros), de la part de 158 anciens. Pour optimiser l’utilité de ces dons, l’association a d’abord choisi de regrouper le financement avec les associations des anciens en Chine de deux autres écoles françaises et fait une commande de plus de 17 000 masques N95, qui manquaient cruellement aux médecins et infirmières français en première ligne. Cependant, la guerre des masques avait commencé en Chine au moment où nous faisions notre commande, de nombreux pays s’approvisionnaient en Chine, et en même temps de nombreuses initiatives étaient lancées par des associations des anciens comme nous, par d’autres structures, ou encore individuelles, pour soutenir de nombreux pays pour lesquels ils ont un attachement.
Finalement, notre commande n'ayant pu aboutir à cause de plusieurs incidents, nous nous sommes lancés dans le 2ème round de recherche de fournisseur. Entre temps, nous avons pris connaissance des actions de donation de matériel médical organisées par Fosun Foundation pour plusieurs pays européens, dont la France. Après une consultation rapide avec des anciens, nous avons décidé de renoncer à l’achat des masques par nous-même et de rejoindre les actions de Fosun Foundation, afin de permettre à la collecte de se transformer en matériel médical de qualité qui soit délivré en France dans les meilleurs délais, car le virus n'attendait pas.
Le premier envoi de masques a eu lieu le 6 avril, en raison du changement de politique de dédouanement, ils sont arrivés aux CHU Angers et CHU Nancy le 23 avril. Le 2ème envoi de matériel aux services d’urgence est parti le 23 avril.
Les masques arrivent à CHU Angers
Crédits photo : L. Pailhé
La présidente de la section des anciens à Shanghai, Zoé Hewei Zhou a initié cette campagne de donation en urgence. Avec l’assistance du bureau de Sciences Po en Chine et l’aide des autres anciens chinois, cette mission en urgence est presque accomplie. Selon elle, c’est la première campagne de donation qu’elle a lancée, et l’expérience est inoubliable.
Q : Comment vous avez eu l’idée de lancer cette action de donation ?
Hewei Zhou : Je suis d’origine de Wuhan, qui est maintenant connu dans le monde entier comme épicentre en Chine, bien que j’habite maintenant à Shanghai, mais j’ai la sensation plus forte que les autres en apprenant les nouvelles de ma famille et de mes amis qui habitent encore à Wuhan. De plus mon beau-frère est médecin, il était en premier ligne avec ses confrères. Je connais la réalité dans ces hôpitaux. Quand j’ai vu la propagation rapide du coronavirus en France et le manque crucial des matériels surtout des masques aux hôpitaux, j’ai tout de suite eu cette idée. De plus, ce n’est pas seulement parce que j’ai vécu dans ce pays, et aussi parce que nous savons que la Chine avait aussi reçu de l’aide des matériels médicaux de nombreux pays, dont la France quand le virus touchait notre pays à plein fouet. Mais j’ai aussi eu l’inquiétude du nombre de masque qu’on serait capable d’acheter. Le lendemain, on a décidé d’inviter une école d’ingénieur qui était également en train de faire une donation. On allait regrouper nos récoltes pour être suffisamment gros sur le marché face aux fournisseurs. Ensuite, une autre école de commerce nous a rejoint et nous avons appris qu’il y a un cargo organisé par les autorités françaises qui peut régler notre souci de transport international. Cela est un vrai casse-tête pendant la période de crise quand les vols sont largement diminués, et que les opérateurs de livraison international ne sont pas toujours fiables en raison des politiques de confinement en France, sans parler de leurs prix élevés. Tout s’est passé très rapidement, dès la première idée émergée jeudi, on a lancé la campagne samedi, et a clôturé la donation lundi matin.
Quelle partie de cette expérience est la plus impressionnante pour vous ?
Hewei Zhou : 2 choses m’impressionnent particulièrement. La première est la solidarité et la mobilisation si rapide de nos anciens. Dès la première minute, les donations tombaient intensivement, beaucoup d’anciens ont dit en plaisantant dans notre WeChat group que c’est le retour des allocations de CAF et des bourses dont ils avaient bénéficié. De plus, parmi eux, il n’y a pas seulement les anciens en Chine, mais aussi des anciens chinois à Paris ou à d’autres pays. Certains ont voulu même d’élargir le public pour que nous puissions collecter plus de dons, mais là, il y a probablement un risque légal, nous sommes obligés de refuser cette bienveillance. D’ailleurs, ils sont aussi très nombreux à nous proposer de l’aide dans la recherche des fournisseurs de masques. La 2ème chose qui m’impression est donc la complexité du marché de masque. Derrière un simple masque, il y a des dizaines et dizaines de modèles différents, des standards différents, et de plus, il y a beaucoup de nouveaux producteurs sur le marché depuis février. Nous avons appris plein de choses sur les masques afin d’essayer d’identifier les masques de bonne qualité qui correspondent au standard de l’EU. Mais nous ne sommes quand même pas experts, finalement on s’appuyait sur un grand producteur traditionnel grâce à la mise en contact par une ancienne. La qualité est assurée, mais on a un autre risque : la production ne peut pas être garantie pour les acheteurs indépendants comme nous. A ce moment-là, le gouvernement chinois commençait à réquisitionner la production des grands producteurs traditionnel, car le gouvernement a besoin d’acheter des matériels pour offrir l’aide à beaucoup d’autres pays, le gouvernement a aussi donné une liste verte de ces producteurs les plus sûrs en qualité aux gouvernements étrangers, il reste donc très peu de production pour nous. A la fin, notre inquiétude est devenue la réalité : nous ne sommes pas arrivés à obtenir notre commande à temps pour rattraper le cargo. C’est pour ça que finalement nous avons choisi de rejoindre les actions de donation de Fosun Foundation qui est un des 4 fournisseurs du gouvernement français, c’est à dire qu’ils peuvent assurer la qualité des matériels. De plus, ils ont leurs propres moyens de transport, cela peut assurer que l’aide pourra être arrivé en France rapidement.
Qu’est-ce que vous retirez de cette pandémie qui a d’abord touché la Chine et maintenant se propage dans le monde entier ?
Hewei Zhou : Pendant ces derniers 3 mois, nous avons d’abord témoigné une période historique unprécédente en Chine, surtout celle de Wuhan, tous les chinois ont vécu deux mois confinés avec plein d’émotions différentes. Ensuite, avec cet effet de ‘Déjà Vu ‘nous avons regardé de loin la même chose se développer en Europe et aussi ailleurs. Nous sommes tristes de toutes les vies disparues dans cette pandémie, et nous avons également témoigné dans le monde entier le bien comme le mal des citoyens des médias, des politiciens, je suis surtout contente de voir que c’est le bien de l’être humain qui triomphe et triomphera sur le mal. La solidarité est le seul moyen pour s’en sortir.
En Europe, le tunnel est encore long, mais la lumière de l’aurore est déjà visible, il y a un décalage entre les pays, mais l‘aube arrive chez tous l’un après l’autre.
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