Yves Morin-Lazerges, Service public, 1955
Carte de visite : 07 82 51 61 45 / bettersorrythan@yahoo.com
Carrière dans l’immobilier (Caisse des Dépôts et Consignations, Société des Centres Commerciaux etc.).
Secrétaire du conseil d’administration de l’Union Nationale des Combattants de Castelnau-le-Lez.
Lieutenant de réserve ABC, volontaire en AFN, médaille du combattant d’Algérie.
Licence de droit et d’anglais.
Membre actif du réseau local d’AntiCOR : www.anticor.org
Centres d’intérêt : Voyages, lecture, opéra, politique.
Livre de chevet : La saga préhistorique de The Earth’s Children, de l’Américaine Jean M. Auel.
Citation fétiche : “Better sorry than…”, renversement du prudent “Better safe than sorry!”
Un épicurien plongé tôt dans l’histoire et la politique
Yves Morin-Lazerges aime le chocolat. C’est un chocolat au lait qu’il commande, ce jeudi 8 avril 2015, pour notre entretien en terrasse sur la place de la Canourgue à Montpellier. Un lait à la poudre chocolatée Tonimalt qu’il a bu tous les matins jusqu’en 1944 dans son village d’origine de Saint-Quentin-la-Poterie dans le Gard. «Ma grand-mère maternelle en avait fait une provision de dizaines de boîtes en 1939 même si à la fin la poudre s’était transformée en blocs. » À cette époque, il a neuf ans, apparait son intérêt pour l’histoire et la politique : « Je punaisais sur les murs de ma chambre les cartes des offensives et des fronts changeants de la guerre. Plus tard, nous sommes partis à Lyon et en 1944, avec ma mère, j’ai parcouru la ville avec sa gare et ses rues bombardées. J’ai vu passer des charrettes remplies de morts civils. Une image s’est gravée dans mon esprit, celle de deux pieds de femmes qui dépassaient, avec un seul soulier… J’ai aussi le souvenir de ces Allemands en déroute remontant le Rhône qui s’étaient arrêtés devant mon pensionnat de Notre-Dame de Bellegarde ; ils nous ont donné des bonbons ! Mais j’étais privilégié. Je ne me suis jamais senti menacé. Je n’ai jamais eu faim. Et puis, en 1945, j’avais douze ans, j’ai demandé à mes grand-parents de m’envoyer le journal des résultats des élections législatives ! Les frères maristes ont été surpris de cet intérêt précoce.»
Après la guerre, son père, médecin militaire, est affecté en région parisienne et la famille suit. Le bac en poche, « sans vocation précise », Yves fait une année d’hypokhâgne au lycée Louis le Grand et s’inscrit en licence à la fac de droit du Panthéon. Il y rencontre un étudiant attardé, figure connue de la fac car très actif à la Corpo : Jean-Marie Le Pen. Son activisme jusqu’à aujourd’hui ne l’étonne guère. Yves est ensuite admis en deuxième année à Sciences-Po, « sans concours, venant d’hypokhâgne », où il passe «deux années agréables“, dans une conf animée par Guy de Loÿs et son assistant Belorgey, futur préfet et président du domaine de Chambord. Il côtoie l’étudiant Jacques Chirac, «dynamique, marchant à grandes enjambées autour de la Péniche, avec une prédisposition à l’accolade et la poignée de main faciles. Il donnait l’impression d’avoir un destin. » Et il se fait deux amis durables : Jean-Pierre Soisson, futur maire d’Auxerre, député et ministre, et Robert Lion, futur délégué national de l’Union des HLM, directeur général de la Caisse des Dépôts et Consignations. Yves n’a de l’école que de bons souvenirs et en particulier ceux d’un salon de thé de la rue Saint-Guillaume où l’on servait… du bon chocolat. Cinquième de sa promo de 1955, il est recalé à l’oral de l’ENA l’année suivante. Sa vie s’accélère : mariage, deux premiers enfants (il y en aura six), service militaire de dix-huit mois en Algérie où il se porte volontaire afin de mettre ses actes en adéquation avec ses idées. Il parcourt les montagnes de l’Ouarsenis, puis le Sahara à la tête de 75 FSNA (Français de Souche Nord-Africaine !) Il déplore les occasions manquées de résolution pacifique et fraternelle de cette guerre et reste révolté par le sort qui fut réservé aux Harkis.
Constructeur des « Trente Glorieuses »
Avec les années 1960 commence une carrière dans l’immobilier qui pourrait illustrer dans les manuels d’histoire la période que les enfants de la crise ont appris à nommer avec vénération «les Trente Glorieuses». Il devient directeur à la SCET (Société Centrale pour l’Équipement du Territoire) filiale de la Caisse des Dépôts et Consignations. Administrateur de la SERM (Société d’Équipement de la Région Montpelliéraine), il « signe le chèque » d’achat du domaine de la Paillade au marquis de Baroncelli : 212 hectares où le maire François Delmas fait construire la ZUP destinée à accueillir des rapatriés d’Algérie. Yves dirige ensuite le département bureaux de la SCC, Société des Centres Commerciaux créée par Robert de Balkany, l’entrepreneur qui a introduit en France le concept américain de centre commercial ! Yves est fier d’avoir été maître d’ouvrage pour la réalisation du « Crayon », gratte-ciel de bureaux emblématique de Lyon conçu par les architectes new-yorkais Cossutta et Pei. Suivra une expérience plus mitigée à Sarcelles : directeur du centre commercial des Flanades, Yves connaît des relations tendues avec le maire communiste de l’époque, défavorable à l’installation d’un phare de la société de consommation dans la commune. De 1981 à 1998, Yves préside différentes sociétés familiales immobilières qui l’amènent à diriger quelque trois cents assemblées générales de copropriété par an… et au burn-out ! Revente des sociétés. Retour au calme puis dans le midi en 2006.
Yves est aujourd’hui actif dans plus d’une dizaine d’associations dont la section locale d’antiCOR, organisation qui regroupe des élus et des citoyens de toutes tendances politiques, ayant décidé de s’unir pour lutter contre la corruption et pour réhabiliter la démocratie représentative. Elle propose aux candidats aux différentes élections de signer une charte éthique. Chose faite en 2014 par le candidat et désormais maire de Montpellier Philippe Saurel. Cette implication citoyenne ne masque pas le pessimisme d’Yves sur l’évolution de la société française et sa faculté à sortir par le haut des différentes crises qui la traversent : politique, économique, culturelle… au point de conseiller à ses treize petits-enfants de songer à une vie ailleurs, là où l’herbe sera sans doute plus verte. « Même le théâtre des 13 Vents à Montpellier, depuis qu’ils y découpent des homards vivants et qu’ils prennent cela pour de l’art, je n’y vais plus regrette-t-il, bien que j’aime beaucoup manger du homard ! » Mais il adore les soirées opéra du Gaumont où sont diffusés en « direct live » les spectacles du Metropolitan Opera de New York, le fameux MET, et assiste avec son père (99 ans aux prunes !) au café-poésie mensuel à Montpellier (« L’événement Insolite »). Il a également beaucoup apprécié les diners mensuels Sciences-Po organisés par l’ex président Jean-Paul Charbaut pour « la qualité des discussions » et, gourmand, le plaisir d’un dessert au chocolat.
Par Françoise Bougenot
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