Service de presse entre Alumni #14 : L'inconnu de la rue Vivienne, de Blandine de Lestrange
20/03/2024
« Premier roman publié, aussi érudit qu’enthousiasmant » : Pierre de Montalembert (promo 2006) nous explique pourquoi il a aimé L'inconnu de la rue Vivienne, de Blandine de Lestrange (promo 2013), paru en février 2024 aux éditions Istya et Compagnie.
Le livre
L'autrice
Après avoir passé dix ans à travailler dans le domaine du vin et des spiritueux, Blandine de Lestrange décide de se consacrer pleinement à l'écriture.
En 2020, elle crée la plateforme Le Bateau dans les nuages, une série de contes poétiques personnalisables et sur-mesure à destination des familles, et travaille en parallèle sur plusieurs projets de livres. L'Inconnu de la rue Vivienne est son premier roman publié.
Présentation du roman par la maison d'édition
8 juin 1795 : Louis XVII, duc de Normandie et second fils de Louis XVI et de Marie-Antoinette, héritier du trône de France, meurt à la prison du Temple dans l'indifférence générale.
Et si le véritable héritier du trône avait survécu ?
Et s'il ne s'agissait pas de Louis XVII mais d'une doublure ?
Le 19 janvier 1794, trois silhouettes pénètrent dans la prison du Temple pour faire s'évader Louis XVII, mais les choses ne se passent pas comme prévu. Le trio est trahi par Pierre de Saint-Régent, l'âme damnée du futur Louis XVIII, qui tente d'assassiner l'enfant royal. Il échoue, mais Louis se retrouve seul dans les rues de Paris. Déboussolé, affaibli, il est détroussé et laissé pour mort dans une ruelle crasseuse. Louis ne doit son salut qu'au courage d'une jeune fille, Juliette Ramponneau, qui lui porte secours et l'accueille chez ses parents. Pour échapper à Saint-Régent, Louis devient Antonin et se cache chez Sylvain Bailly, célèbre pâtissier de la rue Vivienne où il fait ses classes en tant qu'apprenti.
L'histoire reprend cinq ans plus tard à la faveur de la parution d'un roman intitulé "Le cimetière de la Madeleine" défendant la thèse de l'évasion de Louis XVII et l'attentat de la "machine infernale" contre Napoléon Bonaparte. Deux événements orchestrés par Pierre de Saint-Régent, qui changeront le cours de l'Histoire et de la vie d'Antonin.
L'incipit du roman, et un extrait choisi par Pierre
Le petit garçon ouvrit les yeux, mais ne distingua rien dans les ténèbres. Il trembla en pensant à toutes les créatures effrayantes qui se tenaient tapies dans sa chambre, prêtes à le dévorer. Il y en avait dissimulées dans les commodes et les secrétaires, cachées derrière les paravents et les bergères, pelotonnées dans les murs recouverts de cet horrible papier peint jaune qu’il détestait tant, et même sous les planchers vermoulus. Il avait particulièrement peur des ogres logés dans les tourelles et les appartements du premier, occupés toute la journée à jurer, à rire bruyamment et à essayer de l’atteindre de leurs longs crachats verts et visqueux. Il enfouit sa tête sous sa couverture pour se protéger.
Fernand Dubrest l'abandonna au beau milieu de la cour intérieure. Après la chaleur intense, le petit garçon se mit à trembler, il se recroquevilla pour lutter contre le froid. Il essaya, comme au Temple, lorsqu'il était triste, d'isoler des souvenirs heureux avec ses parents - sans succès. Le froid engourdissait tout. Ses yeux tombèrent alors sur un pétale de rose, dont l'existence même semblait étrangement déplacée. Comment s'était-il retrouvé ici, brimbalé par le vent glacial ? Le pétale, jadis de couleur mauve, avait commencé à brunir, il ne resterait bientôt plus rien de sa splendeur passée. Antonin en fut remué, comme s'il y lisait une métaphore de sa propre existence.
L'avis de Pierre
Qu’ont en commun Louis XVII, fils de Louis XVI, mort dans la prison du Temple, et Antonin Carême, enfant pauvre qui s’est élevé à force de travail et de génie au titre de « roi des chefs et chef des rois » ? Rien en apparence. Tout si l’on laisse libre cours à l’imagination, ainsi que le fait Blandine de Lestrange dans ce premier roman publié, aussi érudit qu’enthousiasmant.
L’innocence, l’engagement, la vengeance
Si de multiples personnages parcourent le livre, trois dominent : Louis, ou Antonin, bien sûr, qui se caractérise d’abord par son innocence. Celle de l’enfant martyr et apeuré, érigé en symbole et victime d’enjeux qui le dépassent, ne sachant plus à qui se fier et qui va, durant tout le roman, opposer au monde une sorte de candeur qui le rend si attachant et lui permet d’affronter tous les obstacles.
Vient ensuite Juliette, fille d’aubergistes, qui vient en aide à Louis sans imaginer qu’elle sauve la vie de l’héritier du trône de France et qui pour sa part personnifie l’engagement. C’est une adolescente puis une jeune femme passionnée par la cause des femmes ; elle se veut l’héritière de ses aînées telles qu’Olympe de Gouges et Manon Rolland, et pour être digne de telles héroïnes, elle se révèle prête à toutes les audaces, tous les combats de l’égalité.
Parcourt aussi le roman la figure de Pierrot, orphelin des rues, qui se bat et déploie des trésors d’ingéniosité pour que son frère, simple d’esprit, et lui survivent dans un monde au mieux indifférent, au pire hostile. Parce qu’il a dérobé des objets précieux à Louis qu’il croit mourant, son chemin va être bouleversé et il ne va plus désormais avoir qu’un but : la vengeance, quel qu’en soit le prix, quelles qu’en soient les conséquences.
Louis, Juliette, Pierrot : trois héros, trois personnages dont les destins se croisent, se mêlent, dans les soubresauts de l’histoire, et qui tous trois exemplifient un quatrième trait de caractère : « la volonté, celle qui donne la force de soulever des montagnes ».
L’histoire et ses figures
A la suite des différents protagonistes, nous sommes amenés à voyager, que ce soit dans les lumières des palais ou dans l’atmosphère souvent confinée et étouffante des cuisines, auprès de Murat à Marengo et à Naples, dans la cour des miracles ou encore à Lyon pour croiser un certain cuisinier répondant au nom de Bocuse. Nous frémissons d’horreur à la prison du Temple ou sommes révoltés par le traitement infligé aux femmes à la Salpêtrière. Nous discutons avec Fouché et Talleyrand, dont l’autrice montre bien la rouerie mais aussi une forme de génie, et qu’elle parvient à rendre, en fin de compte, sympathique. Nous apercevons de loin Napoléon, sommes bouleversés par la déchéance et le sacrifice d’Anne-Josèphe Théroigne de Méricourt.
Des clins d’œil
Le roman ne s’interdit pas non plus quelques clins d’œil à la littérature ou à l’histoire. Au gré de la lecture, on croise ainsi un aubergiste peu recommandable répondant au nom de Thénard, et semblant préfigurer le Thénardier des Misérables, un soignant portant, comme le fondateur de la Croix Rouge, le nom de Dunant, ou encore un pâtissier dont la dernière création, qui a le don de replonger le héros dans ses souvenirs d’enfance, est appelée en hommage à sa femme : Madeleine…
Pourquoi ce livre devrait plaire aux Alumni de Sciences Po
C’est un livre qui parlera aux lecteurs et lectrices qui aiment les péripéties, les romans feuilletons héritiers du XIXe siècle et d’Alexandre Dumas, les romans féministes, historiques, d’aventures, formation, mais aussi de cuisine, montrant que l’on peut réunir des ingrédients aussi différents et parvenir à un résultat très réussi !
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