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Services de presse entre Alumni #22 : Le jeu de l'oie, de Catherine Pasquet

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Club Littérature

09/02/2025

« Une critique subtile mais incisive du milieu culturel », « un récit à la fois divertissant et bien construit »Sylvaine Boussuard - Le Cren (promo 1982) nous explique pourquoi elle a aimé Le jeu de l'oie de Catherine Pasquet (promo 1978), paru en décembre 2024 chez Nombre7.


Le livre


L’autrice

Photo Babelio 


Née en 1956 à Agen, Catherine Pasquet est diplômée de Sciences Po Paris en 1978. Elle s’oriente alors vers le management des établissements de santé et entame un parcours dans divers hôpitaux du sud de la France, notamment en psychiatrie. À partir de 2018, à l’issue d’une carrière que l’on devine riche en expérience, elle découvre Marseille et s’y consacre à l’écriture. Le jeu de l’oie, paru en novembre 2024 est son second roman. Un troisième est en préparation.


Présentation du livre par l’éditeur

Quand les cultureux s’entretuent…

« Les méchants sont toujours punis. Le sort se charge parfois de machinations implacables. » C’est ainsi que sa mère consolait Luc lorsque, enfant, il se réfugiait dans sa chambre après avoir été moqué par ses camarades de classe.

En ce mois d’août 2020, Luc est un informaticien apprécié qui travaille au service culture de la mairie de Marseille. Il a appris à contourner ce que les autres appellent son handicap et qui le rend un peu « bizarre ». Il rêve de faire partie de l’équipe de techniciens qui va partir au Louvre Abu Dhabi.

Mais quelques jours avant le second confinement, l’épouse de son patron est assassinée. Le capitaine Adam Volterra mène l’enquête.

Il a plusieurs suspects : le mari, l’amant… et Luc.

À moins que le meurtrier ne soit un quatrième individu ?

Une histoire galopante, au ton souvent acide, entrecoupé de beaux moments de tendresse et d’amitié.


Des extraits choisis par Sylvaine

L'incipit

Elle descend les marches prudemment, une main agrippée à la rampe, l’autre tenant un gros sac-poubelle. Elle n’aime pas prendre les escaliers mais l’ascenseur est en panne.
La porte du hall de l’immeuble s’ouvre soudain sur une silhouette sombre, un homme avec un sac de coursier accroché aux épaules, qui se dirige droit vers l’ascenseur sans la remarquer. Arrivée sur le palier, elle le prévient, en élevant un peu la voix car elle a son masque : « L’ascenseur est en panne ».
La tête de l’homme, entièrement dissimulée sous un casque de moto, pivote d’un coup vers elle. Le corps, vêtu d’une combinaison intégrale de cycliste, reste immobile. L’homme semble la fixer.
Elle se souvient que le jeune couple du dessus se fait régulièrement livrer des sushis, c’est lui qui aura donné le code de l’entrée. « Vous devez aller au troisième ? » demande-t-elle pour se rassurer. Il reste muet, s’avance vers elle. Il est très grand. Elle plisse le front, cette allure lui est familière.
Il tend le bras vers une poche de son sac à dos, il est à présent à sa hauteur. Elle frissonne, fait glisser lentement le sac-poubelle devant elle, comme pour se protéger. Il sort un poignard de son étui avec dextérité, sans faire de bruit.

Un deuxième extrait

La toile est extraite du tube cartonné. Un serpent enroulé, compact, segmenté en espaces rectangulaires où se nichent des images, apparaît. La queue est d’un noir brillant, le tronc présente des nuances de gris et de marron, la tête est rouge sang et crache une explosion, l’œil est presque humain. Un serpent
menaçant, prêt à bondir, dessiné avec précision.
Le regard d’Invader s’attarde. Puis l’artiste prend Luc par l’épaule et ils s’éloignent.
— Grave ! s’exclame à voix basse Gwendoline, de retour, par-dessus l’épaule d’Adam. Qu’est-ce que vous en dites ?
— L’expression est puissante mais sombre, répond Gabriel qui les a rejoints. Elle puise dans le registre du jeu du serpent autant que dans celui du jeu de l’oie. L’alliance des deux circuits est singulière. Et ce n’est pas n’importe quel reptile qui est représenté. C’est une vipère. La vipère est sournoise et tue.

L'avis de Sylvaine

Un roman policier inhabituel

« Le jeu de loie » est le deuxième roman de Catherine Pasquet. Après Total succès,  sorti en 2022 et qui avait fait l’objet ici d’une précédente chronique, lauteure nous offre une nouvelle enquête du capitaine Adam Volterra, cette fois-ci ancrée dans le milieu culturel marseillais au sein duquel il va devoir élucider le meurtre d’une archiviste alors que la COVID est toujours présente et qu’un confinement va compliquer les choses. 

Toutefois, de façon quelque peu inhabituelle dans un récit policier, l’enquêteur n’est pas au centre de l’histoire, qui se concentre surtout sur la vie et les états d’âme de l’un des suspects, le jeune Luc Amarine, un « Aspie » -comme il se désigne lui-même- qui peine à trouver ses marques dans son milieu professionnel et dans le monde en général bien qu’il soit un informaticien talentueux, mais qui heureusement trouvera en Iris et Adèle des alliées de choc.

Marseille, personnage à part entière

Catherine Pasquet démontre une maîtrise remarquable de la narration policière. Son expérience professionnelle dans le domaine de la psychiatrie enrichit la profondeur psychologique de ses personnages, rendant leurs motivations et comportements particulièrement crédibles. Lauteure excelle à brouiller les pistes, maintenant le suspense jusqu’à la dernière page.

Le choix de Marseille comme toile de fond ajoute une dimension authentique à lhistoire. La ville est dépeinte avec une précision telle que ses rues et ses ambiances deviennent presque des personnages à part entière. Cette immersion géographique renforce latmosphère du roman et offre au lecteur une expérience sensorielle riche tandis que l’artiste Invader décore les murs de la ville.

Des thèmes riches

Le titre, Le jeu de loie, est une métaphore habilement exploitée tout au long du récit. Il symbolise les aléas de la vie et les imprévus auxquels les personnages sont confrontés, rappelant que chaque décision peut les rapprocher ou les éloigner de la vérité.

Au-delà de lenquête policière, le roman aborde des thèmes profonds tels que la marginalisation, la perception du handicap, et les jeux de pouvoir au sein des institutions culturelles. Pasquet offre une critique subtile mais incisive du milieu culturel, mettant en lumière ses hypocrisies et ses rivalités internes.

 Pourquoi ce livre devrait plaire aux Alumni

Le jeu de loie est un roman original tant par la manière dont son sujet (une vengeance alambiquée) est abordé que par la forme du récit, en chapitres courts (ce qui semble désormais être une marque de fabrique de l’auteure). Le cadre professionnel dans lequel le récit est déployé (la mairie d’une grande ville du midi où les rivalités entre carriéristes sont ombreuses) a toutes les apparences de la réalité. 

Catherine Pasquet confirme son talent d’écrivaine en livrant un récit à la fois divertissant et bien construit, prenant ainsi sa place dans le paysage de la littérature policière francophone.

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