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Rencontre avec Kayi Rose Mivedor, DG d'Orabank Gabon

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04/09/2018

 

Pour le cinquième numéro de la série « Regards d’Alumni Afrique », nous vous proposons de découvrir le profil et parcours de Kayi Rose Mivedor, Directrice Générale d'Orabank Gabon. Elle est diplômée de l'Executive Education de Sciences Po (promo 17). 


Kayi Rose Mivedor lors de la remise du Prix de la Fondation Africa France pour l'Entreprenariat Féminin, à Sciences Po

 
Pourquoi avoir rejoint Sciences Po Paris, et en quoi l’école a-t-elle influencé la suite de votre parcours ?

J’ai rejoint Sciences Po dans le cadre du programme de formation de leaders pour l’Afrique de demain (Lead CAMPUS édition 2017) organisé par l’Agence Française de Développement, la fondation Africa France en partenariat avec Sciences Po Paris, ISM de Dakar et le GSDPP de Cape Town. Je pense que la renommée de Sciences Po Paris, le parcours des étudiants qui en sortent à travers le monde, l’ouverture d’esprit et la diversité aussi bien des étudiants que des enseignants, constituent tous les ingrédients qui ont suscité mon intérêt pour cette formation où Science Po Paris apportait le support pédagogique. 

Cette formation m’a permis d’avoir une connaissance transversale aussi bien dans le domaine de la gestion financière, de la gestion de projets, de l’économie politique, du développement durable et surtout de voir des passerelles entre le public et le privé, et vice versa.

Ce programme, outre la mise en place d’un réseau extraordinaire avec des ressortissants de plusieurs pays africains, allant de l’Afrique du sud, à l’Afrique du nord et à l’Afrique subsaharienne, a exacerbé ma sensibilité à la notion de développement durable pour préserver notre continent pour les générations futures. Ceci d’autant plus qu’au Togo mon pays d’origine, nous sommes confrontés à l’érosion côtière d’une part et d'autre part au dérèglement climatique avec une modification de la période et de la durée des saisons de pluies ce qui impacte négativement la production agricole. 

Aujourd’hui, le réchauffement de la planète entraîne la fonte des glaciers, le relèvement du niveau des mers... et les zones les plus exposées sont situées au niveau de l’équateur selon les spécialistes en la matière, or l’Afrique subsaharienne se trouve en plein cœur de la zone de tourmente. Comment ne pas être sensible au discours de développement durable et de préservation de la planète !

Enfin, ce programme m’a également permis de cerner le rôle que peuvent jouer les acteurs du privé dans la sphère publique en alliant le profit et le bien-être des populations.     

 

Vous êtes Directrice Générale Adjointe d’Orabank Togo, quelques mots sur votre carrière ?

De  formation de base en droit des affaires (Maitrise de droit des affaires à l’Université de Lille II) et d’un  3ème cycle d’Administration des entreprises à l’Université de Paris I – Panthéon Sorbonne, j’ai aujourd’hui une quinzaine d’années d’expériences dans le secteur bancaire, acquises au cours de mon parcours dans quatre institutions bancaires (dont trois groupes bancaires régionaux). Je suis passée du juridique, au risque et à l’exploitation, pour aboutir à la Direction Générale aujourd’hui.

De 2006 à 2012 j’ai occupé le poste de Directrice des risques au sein de la banque atlantique Togo, avant de faire un mouvement transversal trois ans plus tard pour occuper le poste de Directrice Clientèle Entreprise. Fin 2012, je rejoins la succursale togolaise du groupe Nigérian Diamond Bank, en tant que Directrice Clientèle Entreprise, avant de  prendre la Direction Générale six mois plus tard. 

Je dois dire qu’il s’agissait toujours de nouvelles banques qui s’installaient sur le territoire togolais, où j’ai eu l’exaltante opportunité de compter parmi ceux qui ont participé à la création et au  développement de ces banques  sur le marché togolais.    

En janvier 2016, je décide de  rejoindre le groupe Orabank, notamment la filiale du Togo, en qualité de Directrice Générale Adjointe en charge de l’exploitation et depuis le 1er mars  2018 j’assume la Direction Générale de la filiale du Gabon.

 

Pourquoi avoir choisi cette voie ? 

En faisant du droit privé, option droit des affaires,  je ne me prédestinais pas forcement au secteur bancaire. J’ai longtemps hésité entre la fonction de juriste d’entreprise et celle d’avocat d’affaires. Toutefois, à mon retour au Togo, mon premier poste a été au service juridique d’une banque d’Etat ou j’ai eu l’opportunité de participer à des projets extraordinaires et structurants tels que la privatisation d’une banque d’Etat par l’ouverture du capital à des opérateurs privés.

Cette première étape m’a permis de voir l’importance du secteur bancaire dans le financement de l’économie et la création de richesse au niveau essentiellement des PME/PM, la banque où je travaillais se positionnant essentiellement sur le segment des PME/PMI particulièrement dans le secteur du bâtiment et de travaux publics. J’ai eu l’opportunité de voir comment le secteur bancaire participe activement à la transformation de petites PME/PMI en de grandes entreprises locales par le financement et le conseil.

Ainsi, malgré une période de cinq ans dans le secteur pétrolier au Togo, en qualité de juriste, je n’ai pas hésité quand l’opportunité s’est présentée de revenir au secteur bancaire en 2012, où j’ai rejoint l’équipe dirigeante d’une nouvelle banque qui s’installait au Togo, en qualité de Directrice des risques.  

 

Comment percevez-vous votre rôle ? 

J’ai toujours évolué dans un monde masculin au niveau des équipes de direction, mais la question du genre ne s’est jamais posée dans la mesure où votre compétence et votre savoir-faire sont reconnus par le groupe. Être femme dans le monde professionnel, aussi bien au niveau de l’équipe de direction qu’à des échelons moindres, implique une bonne organisation dans sa vie personnelle afin de concilier les deux, de l’audace et une grande confiance en soi.

J’espère vivement inspirer et servir de modèle aux femmes et jeunes étudiantes dans le secteur privé au Togo et en Afrique, afin que ces dernières fassent fi des barrières invisibles (physiologiques, sociales et culturelles) qui pèsent sur le développement du leadership féminin dans nos sociétés.

Je souhaite que chacune d’elles puisse se dire, « pourquoi pas moi », « je peux le faire » !

Mon histoire est une histoire que les jeunes filles devraient pouvoir se raconter en disant « c’est possible » ; avec beaucoup de travail, de la rigueur et de l’audace.

 

Comment percevez-vous les dynamiques actuelles du secteur bancaire en Afrique de l’Ouest? Quelles évolutions sont à prévoir ?

Aujourd’hui, le secteur bancaire en Afrique est en pleine révolution, avec une croissance de plus en plus soutenue du taux de bancarisation, ce dernier étant de l’ordre de 10% en Afrique francophone, contre environ 30% en Afrique anglophone. Il en ressort que des marges de progression restent disponibles.

La percée du « mobile money »  participe également à l’inclusion financière. Ainsi, après les alliances entre les banques et les assurances pour la création de produits de bancassurance, nous sommes à l’ère de  l’alliance entre les banques et les telecoms.

Bien que les infrastructures telecoms ne couvrent pas encore tout le territoire de manière efficiente, le « digital banking » reste l’avenir de la banque de détail car elle permet d’atteindre les clients dans les zones les plus reculées sans les coûts liés à la construction d’une agence bancaire. Il s’agit certainement d’une niche de génération de revenus. Le taux d’urbanisation croissant de nos sociétés, et la jeunesse galopante reste également une réelle opportunité pour la banque digitale avec toutes les solutions offertes. 

Aujourd’hui, tout Africain - qu’il vive en zone rurale ou zone urbaine - dispose d’un mobile. Dans cette situation, la bancarisation du plus grand nombre, souhaitée par les autorités, passera par le mobile, qui est dans la poche de plus de la moitié des Africains de plus de 15 ans.

Dans une étude publiée par le cabinet Boston Consulting Group (BCG), ces derniers estiment à 400 millions le nombre de personnes qui posséderont en 2019 un mobile et seront, de par leurs revenus, susceptibles de bénéficier de services bancaires. Parmi elles, 149 millions seulement s'adresseront à une banque traditionnelle, faute de réseaux d'agences suffisamment étoffés pour atteindre tout le monde, mais aussi, du côté des clients, de revenus suffisants pour s'offrir autre chose que des services basiques. L'essentiel de la population africaine gagne en effet moins de 1.000 dollars par an. Il restera donc, selon le BCG, 251 millions de personnes à bancariser via le mobile sur un modèle low cost.

La solution sera au travers de partenariats entre les banques et les sociétés de télécoms, les premiers apportant la sécurité des opérations, les seconds l’infrastructure requise.

Regards d’Alumni Afrique

Sous la forme de courtes interviews retraçant le parcours d’anciens de l’école actifs sur le continent africain, cette initiative célèbre la richesse et la diversité des profils des alumni qui travaillent sur des problématiques ayant trait à l'Afrique. 

L’objectif de « Regards d’Alumni » est double :

1) inspirer la communauté des alumni et étudiants de Sciences Po par le récit de parcours singuliers

2) mettre en avant des secteurs et activités clés en Afrique et l'analyse que porte les Alumni sur les évolutions de leur secteur d'activité en Afrique

Contact : afrique@sciencespo-alumni.fr 

POUR RELIRE LE PRÉCÉDENT ENTRETIEN DE LA SÉRIE CLIQUEZ ICI

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