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Pascal Perrineau : l'édito du Président

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25/03/2020

Dix jours de confinement commencent à nous faire prendre conscience d’un changement profond de notre rapport au temps et à l’espace et donc de notre rapport à la vie qui n’est qu’un point dans l’espace-temps.

On le sent bien, le temps, qui était depuis des décennies celui de l’accélération permanente avec ses fantasmes de cerveaux multi-tâches, de multitasking ou encore de personnalités polychrones, a laissé la place à un temps ralenti, suspendu où nous retrouvons le temps du voyage intérieur, libéré du temps et de l’espace. Nombre d’entre nous perdent même peu à peu la scansion du temps en heures, journées et semaines… Ce ralentissement temporel et les perspectives qu’il offre laisseront-t-ils des traces durables ou ne seront-ils qu’une éphémère parenthèse dans cette tendance de fond qu’est devenue la course frénétique d’un temps de plus en plus éclaté entre de multiples activités professionnelles, de transport, ludiques, familiales, amicales ou associatives ? Un temps qui ne se donne plus le temps de savoir qu’il passe lentement par le chas de l’aiguille des heures.

L’espace ensuite, celui du confinement où l’impératif devient celui de « rester chez soi », d’explorer les charmes du voyage autour de sa chambre et de s’isoler du commerce des autres et de l’envahissement des liens multiples mais souvent faibles qui sont les nôtres. Ce repli sur l’espace personnel et sur l’espace d’habitation éloigne des grands espaces, celui des mégalopoles, celui des voyages à l’intérieur et à l’extérieur de l’espace national et même celui de l’espace monde que l’on cherche et qui vient nous chercher en permanence. En 2017, selon l’IATA le seuil de 4 milliards de voyageurs par avion a été dépassé soit un rythme de 127 passagers par seconde. Certes, cet espace ouvert à tous les vents peut être celui des échanges mais aussi celui de ce remarquable film de Sofia Coppola « Lost in translation » où deux individus perdus dans un hôtel international au bout du monde se découvrent comme étrangers à leur propre histoire.

La vertu de cette étonnante expérience humaine que nous traversons nous fait redécouvrir la part de fragilité mais aussi d’humanité qui est la nôtre à condition qu’on lui donne le temps et l’espace pour s’exprimer.

Pascal Perrineau
Président de Sciences Po Alumni

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